Pour qu'Aleteia poursuive sa mission, faites un don déductible à 66% de votre impôt sur le revenu. Ainsi l'avenir d'Aleteia deviendra aussi la vôtre.
*don déductible de l'impôt sur le revenu
Aleteia : pouvez-vous nous parler des dernières avancées dans l’œcuménisme ?
Père Luc Forestier : Nous sommes dans une étape que je qualifierai de nouvelle pour deux raisons : premièrement, le pape François a une expérience personnelle de la rencontre de groupes chrétiens. Il est l’ami de pasteurs évangéliques. Un deuxième élément de contexte est ce que l’on appelle parfois l’œcuménisme du sang : les chrétiens forment un groupe persécuté dans le monde. Nous ne sommes plus seulement dans un œcuménisme de l’eau du baptême mais dans un œcuménisme du martyre. Et entre le baptême et le martyre, on voit tout ce que fait l’Église dans la proclamation de l’Évangile, la célébration de la liturgie et des sacrements et le souci des plus pauvres. De nombreuses actions œcuméniques existent dans la prise en charge des plus démunis, comme l’ACAT (Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture). On note aussi tout ce qui est activité liturgique de prière, avec des lieux comme comme Taizé ou la Maison d’Unité à Paris. Enfin, le troisième élément concerne ce qui est proprement doctrinal, la recherche du dépassement des ruptures confessionnelles. En cinquante ans, on a vu des progrès considérables. On peut noter la Déclaration commune sur la justification par la foi, signée en 1999 par l’Église catholique et la fédération luthérienne mondiale. Ce n’est pas un texte de convergence, mais du consensus différencié : nous disons des choses différentes tout en reconnaissant que nous sommes d’accord sur l’essentiel.
Lire aussi :
Protestants et catholiques, l’examen des sept différences
Pouvez-vous nous parler du lien avec nos frères orthodoxes ?
En 2016 s’est tenu un “grand et saint” concile panorthodoxe. Les orthodoxes eux-mêmes sont dans une forme d’avancée sur le chemin conciliaire. Les catholiques ont eu de grands dialogues avec eux. Le geste initial a été cette fameuse rencontre entre Paul VI et Athénagoras en 1964. On a vu des déclarations assez considérables de travaux de commissions entre catholiques et orthodoxes, comme le fameux document de Balamand en 1993 (sur le fait que l’uniatisme ne peut être un modèle de l’unité que nos Églises cherchent, ndlr), et celui de Chieti en 2016 (il dispose que le premier millénaire “représente un point de référence nécessaire et une puissante source d’inspiration pour les catholiques comme pour les orthodoxes”. Cela révèle des progrès dans nos rapports.
L’œcuménisme n’aurait-il pas pour conséquence de nous éloigner de notre vocation?
Au contraire, il nous permet de mesurer que c’est de l’intérieur même de ce qui nous habite que nous serons unis et de mieux comprendre nos propres appartenances confessionnelles.
Est-il vraiment réaliste de vouloir une Église universelle ?
L’Église catholique elle-même est plurielle. Le problème n’est pas la diversité, dont il faut se réjouir, mais la désunion. L’œcuménisme ne vise pas à écraser la diversité mais au contraire à dépasser ce qui est de l’ordre de la désunion pour vivre cette communion dans la différence. Quand on voit tout ce qui a été possible en cinquante ans, c’est impressionnant. Nous sommes en chemin.
Lire aussi :
Infographie : se repérer parmi les églises protestantes
Comment ces progrès sont-ils perçus par les fidèles ?
Les gros efforts faits sur le plan doctrinal sont mal connus par les chrétiens. La difficulté est de faire percevoir ces progrès au niveau des paroisses et des communautés. Voilà pourquoi l’œcuménisme n’est pas que doctrinal mais aussi spirituel et caritatif. Nous, universitaires, portons le souci de faire en sorte que les chrétiens soient initiés à ces réalités œcuméniques afin d’être acteurs de cet œcuménisme.
J’ajouterai que dans cette semaine pour l’unité des chrétiens, la question du rapport structurant avec Israël tient une place. Ensemble, nous sommes dans un rapport avec Israël, le peuple qui dure parce que Dieu veut qu’il dure. Cette permanence d’Israël est pour nous un lieu de communion entre diversités.
Pour terminer ?
Je conclurai de trois manières. Premièrement, la prière. Pas seulement cette semaine ! S’il vous plaît, continuez les cinquante et une autres semaines. Deuxièmement, le souci des plus pauvres. Enfin, la formation : on découvre beaucoup mieux sa propre foi quand on entre par une porte œcuménique.
Propos recueillis par Domitille Farret.