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Créée en 2003 aux Pays-Bas, la journée mondiale du compliment se veut être la journée la plus positive de l’année. « Un compliment sincère et personnel ne coûte rien mais son impact sur le destinataire est énorme », affirme le Hollandais Hans Poortvielt, initiateur de cette journée. À cette occasion Emmanuel Jaffelin, philosophe et écrivain français (Éloge de la gentillesse, Petit cahier d’exercices de gentillesse), revient pour Aleteia sur l’importance de la gentillesse et la nécessité de savoir faire – et recevoir – des compliments.
Aleteia : Être gentil, est-ce une qualité ou un défaut ?
Emmanuel Jaffelin : Souvent mal vue, la gentillesse est une vertu qui peut être propédeutique à la foi. Mais de par son histoire lexicale, c’est une notion ambigüe. La racine latine du terme « gentil » signifie noble, celui qui est bien né. Ce terme va être par la suite galvaudé au contact de la religion : à l’image des juifs qui ont le mot « goy » pour les non-juifs, les chrétiens vont choisir le mot « gentil » pour définir les non-chrétiens. Par exemple, au XIIIe sicèle, saint Thomas d’Aquin a écrit un traité théologique intitulé Somme contre les gentils. Saint Paul sera baptisé l’apôtre des gentils ! D’où l’ambiguïté du terme aujourd’hui. J’essaye de convertir ce terme en le fondant sur une morale dont le cœur n’est autre que l’empathie. Être gentil, c’est être empathique, c’est rendre service à quelqu’un qui vous le demande. Le gentil, c’est celui qui rend service et qui s’anoblit par les services qu’il rend. Ceux qui pratiquent la gentillesse sont les gentilshommes et les gentes dames du XXIe siècle. Cette notion est à distinguer du respect et de l’empathie, qui sont sur le même spectre mais avec des degrés différents : le premier est de l’empathie froide tandis que le second témoigne d’une empathie brûlante.
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L’homme et la femme sont plus prompts à la critique qu’au compliment… Comment y remédier ?
Le compliment est un acte qui consiste à féliciter quelqu’un qui représente une autorité à un moment donné. S’il peut parfois y avoir une idée de soumission et d’hypocrisie sociale nécessaire afin qu’un ordre se maintienne, le compliment a un sens moral très positif. Il permet de reconnaître à quelqu’un son autorité pour l’encourager, le stimuler, lui redonner confiance. La critique comme le compliment font partie des relations humaines. Il n’y a pas à y remédier mais simplement à comprendre que la gentillesse est profondément intéressée… dans le bon sens du terme ! Quand je rends service je suis intéressé par cette relation que je tisse et je me décentre de moi-même pour créer de la sociabilité, de la moralité. De fait, il y a un intérêt, une volonté au départ de créer cette connexion, de tisser de la sociabilité. Mais elle va de pair avec le développement, avec autrui, d’une moralité. C’est drôle car on refuse parfois de complimenter quelqu’un par peur de paraître intéressé… Pourtant, en le formulant – en toute sincérité – mon ego, en s’adressant à un autre ego, se dissout.
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Quelle place pour le compliment dans notre société actuelle ?
À cause de la Révolution française, nous vivons une démocratie très originale en France. On la présente comme la fin de la monarchie et la naissance de la démocratie et de l’égalité. Mais je ne pense pas que ça soit le cas. La Révolution française n’a pas aboli la monarchie. Elle l’a étendue, contaminée et métastasée. Aujourd’hui, chacun se prend pour un roi. Il est difficile pour quelqu’un qui se prend pour un roi, une autorité suprême, de complimenter quelqu’un d’autre… Le compliment n’a donc pas la place qu’il mérite dans notre société. Il y a une pédagogie à faire sur ce sujet.
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Comment faire un compliment ?
En toute simplicité ! Le compliment, c’est de l’intelligence émotionnelle, c’est du positif pour faire du positif. Il s’adresse surtout à quelqu’un qui en manque, qui n’a pas confiance en lui. Un compliment, c’est une suture de la colonne vertébrale chez celui qui le reçoit. Il ne rend pas plus raide, mais il tient plus droit la personne qui le reçoit et qui prendra de la hauteur. Le compliment, c’est savoir se mettre à genoux pour relever les gens.
Et comment le recevoir ?
De la même manière, en toute simplicité ! Il faut savoir accepter d’être touché au cœur. Dans un cas comme dans l’autre, c’est l’amour du Christ qui en est l’horizon.
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