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« En ma jeunesse, c’était une coutume que l’on avoit tournée en cérémonie, de chanter tous les soirs, presque en chaque famille, des Noëls qui étaient chansons spirituelles en l’honneur de Notre Seigneur», écrit Étienne Pasquier, célèbre érudit de la Renaissance.
Les noëls français se chantaient non pas à l’église, où le latin était de mise, mais dans les rues, au coin du feu et même à la cour. Écrits par les poètes les plus en vogue comme par d’illustres inconnus, ils étaient souvent chantés sur des airs profanes connus de tous. En voici un échantillon pour rythmer votre réveillon.
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Enjoué : “Sors de ton lit”
Dans ce petit chant enlevé, le mot de “Noël” fait office à lui seul de refrain : il contient en lui-même, par son étymologie, l’idée de naissance. C’est à l’enfant Jésus que s’adresse avec enthousiasme l’unique couplet, qui rappelle à la fois la naissance terrestre et l’origine céleste du Christ :
“Sors de ton lit paré
Comme un nouveau soleil
Romps les Cieux et descends,
Ange du grand conseil
Enfant mais homme-Dieu,
Fils du Très-Haut
Qui porte ta grand’pricipauté
Sur ton épaule forte“
Un noël de la Vierge : “Une jeune pucelle”
Ce beau chant polyphonique est une réinterprétation de l’évangile de Luc, qui s’ouvre sur le récit de l’Annonciation. Ce célèbre passage des Écritures est reformulé et mis en musique, de l’annonce de l’ange Gabriel au Magnificat de Marie, “jeune pucelle de noble cœur” :
“Une jeune Pucelle de noble cœur,
Priant en sa chambrette son Créateur.
L’ange du Ciel descendant sur la terre
Luy conta le mystère de notre Salvateur.
La Pucelle esbahie de ceste voix,
Elle se peint à dire pour ceste fois :
Comment pourra s’accomplir telle affaire?
Car jamais n’eus affaire à nul homme qui soyt.Ne te soucie, Marie, aucunement,
Celui qui Seignerie au firmament,
Son Saint-Esprit te fera apparaître,
Dont tu ne pourras connaître tost cet enfantement.
Sans douleur et sans peine, et sans tourment,
Neuf moys seras enceinte de cet enfant;
Quand ce viendra à le poser sur terre,
Jésus faut qu’on l’appelle,
le Roy sur tout triomphant.Lors fut tant consolée de ces beaux dits,
Qu’elle pensait quasi être en Paradis.
Se soubmettant du tout à lui complaire,
Disant voicy l’ancelle (la servante) du Sauveur Jésus-Christ.
Mon âme magnifie, Dieu mon sauveur,
Mon esprit glorifie son Créateur,
Car il a eu egard à son ancelle;
Que terre universelle lui soit gloire et honneur.“
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Baroque : “À la venue de Noël”
Les instruments se font plus sonores sur ce petit noël baroque, manifestant toute la gravité de l’événement. Les paroles retracent en effet la lutte entre Lucifer et le Christ, dont la naissance comme la crucifixion nous sauvent du péché, et c’est pourquoi “chacun se doit bien réjouir” :
“À la venue de Noël
Chacun se doit bien réjouir
Car c’est un testament nouvel
Que tout le monde doit tenir.Quand par son orgueil, Lucifer
Dedans l’abîme trébucha
Il nous tirait tous en enfer
Et le Fils de Dieu l’empêcha.Après un bien petit de temps
Trois rois le vinrent adorer
Portant la myrrhe avec l’encens
Et l’or qui est fort à priser.Là, virent le doux Jésus-Christ
Et la mère qui le porta
Celui qui tout le monde fit
Et les pécheurs ressuscita.Bien apparut qu’il nous aima
Quand à la croix pour nous fut mis
Dieu le Père qui tout créa
Nous donne à la fin Paradis.”
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Un “Nowell” anglais
Et oui, le mot “Noël” existait aussi outre-Manche avant de devenir “christmas”, avec tout de même quelques petites variantes orthographiques. La présence de percussions rend la mélodie plus soutenue et plus rythmée que nos noëls français, et le chant nous paraît presque épique. Les paroles mêlent à l’anglais quelques mots de latin, et reprennent aussi le récit de l’Annonciation, comme l’indique le refrain :
“Nowell, nowell, nowell, nowell,
This is the salutation of Gabriel”
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“O Magnum Mysterium”, chanson latine pour les matines
Ce chant de messe n’est pas exactement un noël, mais un cantique sacré en latin chanté aux matines de Noël. Il a été composé par l’illustrissime Victoria, prêtre, maître de chapelle et organiste emblématique de la Renaissance espagnole. Il est ici interprété par des choristes dans l’église Saint-Merry, à Paris, le 29 janvier 2011, pour célébrer les 400 ans de la mort du compositeur. Voici en français les paroles de ce superbe motet :
“Ô grand mystère, et admirable sacrement, que les animaux voient leur Seigneur nouveau-né, couché dans une mangeoire ! Ô heureuse Vierge dont les entrailles méritèrent de porter le Seigneur Jésus-Christ. Alléluia.”