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Le principe du projet de révision de la loi de bioéthique n’est pas contestable. Un de ses objectifs est de réguler les pratiques médicales, qui évoluent très vite sous les effets accélérateurs de la technologie et sous la pression de personnes et de groupes d’intérêt qui veulent aller toujours plus loin, voire qui souhaitent instituer un transhumanisme qui représenterait un saut qualitatif décisif. En revanche, le texte actuel traduit une emprise croissante de la technique et du marché sur les mécanismes du vivant.
La démesure des ambitions collectives
Le 15 juin dernier, le président de la République a été saisi par les Poissons Roses pour qu’il procède à un réexamen de ce projet de loi à la lumière de la pandémie du Covid-19. Emmanuel Macron avait lui-même indiqué que cette crise questionnait notre modèle de développement et nous obligeait à penser différemment pour construire un monde centré sur l’humain. Cette crise a mis en lumière la démesure de nos ambitions collectives et les conséquences majeures de décisions prises en matière environnementale. Déforestations, bouleversements écologiques, volonté de corriger les données et les processus naturels, articulés avec les effets d’une mondialisation sauvage, ont conduit à des phénomènes insoupçonnés, dont personne ne concevait l’ampleur. Les lois bioéthiques sont au cœur de la volonté de maîtrise de technologies qui risquent de défigurer la représentation que nous avons de l’humain et de son corps.
Le marché du sperme
Derrière le souci de répondre au désir d’enfants de la part de femmes, seules ou en couple, se mettent en place des processus de maîtrise de la procréation qui rendront obligatoire le recours au marché, ne serait-ce que pour assurer la gestion des stocks insuffisants de gamètes. Dès juillet 2019, les Poissons roses avaient attiré l’attention sur ce problème susceptible de déboucher sur une “guerre du sperme”. Les appétits financiers lorgnent en effet avec envie sur ces nouveaux marchés qui vont ainsi être libérés.
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Nous dénonçons le silence des partis écologiques et de gauche qui, au nom d’une idée déformée de l’égalité et du progrès, avancent sans état d’âme, voire avec une certaine jubilation, pour détricoter ce qui constitue la substance même de la personne humaine. Personnalistes, nous nous inscrivons en faux face à ce mouvement.
Savoir être à contre-courant
La crise du Covid-19 a mis en avant les aberrations de notre rapport à la nature. Le texte de loi bioéthique adopté par les députés reproduit le même type de comportement face à l’humain. Nous vivons depuis le XVIIe siècle dans les plis d’une pensée technicienne. Les lois bioéthiques, qui auraient pu être l’occasion d’une prise de conscience, d’une volte-face, se révèlent le dernier maillon de cet implacable processus. Faudra-t-il que, dans cinquante ans, nos petits-enfants nous fassent honte de nos inconséquences ? Je le crains, hélas. Plus que jamais, faire preuve de courage et de lucidité, c’est savoir être À contre-courant.
À Contre-courant, Manifeste des Poissons roses, Éditions du Cerf, 2016, 10 euros.