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Rome, 1878. Un silence pesant règne dans l’un des somptueux bureaux du Vatican. Depuis sa chaise, le cardinal Parocchi observe la petite religieuse qui se tient devant lui. Mère Françoise-Xavière Cabrini se tient droite, son regard à la fois doux et aussi perçant que celui d’un aigle. Mais malgré ce visage si sûr et plein d’anticipation, le cardinal ne semble pas convaincu. Non qu’il ait trouvé défaut à la présentation de mère Cabrini, ou que l’idée d’évangéliser la Chine et autres contrées de l’est ne lui déplaise, mais c’est une mission de grande taille, qui demande une force et un courage que peu de missionnaires possèdent.
Le cardinal Parocchi ne peut s’empêcher de remarquer l’effrayante maigreur de la religieuse. Malgré son impeccable posture, elle est si petite et son visage, si pâle. La pauvre s’effondrerait si elle portait plus que son voile. Comment confier à quelqu’un de si fragile une tâche aussi lourde ? Au risque de paraître cruel, mieux vaut ne pas lui donner de faux espoirs.
– Je pense qu’il vaut mieux remporter votre rêve avec vous à Codogno, dit-il sèchement, refermant le dossier sur sa table.
À sa grande surprise, le sourire de mère Cabrini s’élargit. Ah, si seulement il savait la raison derrière se sourire ! S’il savait combien d’obstacles la chétive religieuse a déjà traversés !
Depuis son enfance, mère Cabrini sait que Dieu l’appelle à la mission. Mais à cause de sa santé fragile et de son frêle gabarit, toutes les communautés lui avaient fermé leurs portes. Trop fragile, trop malade, trop faible, lui disait-on à chaque fois, et elle rentrait en larme se réfugier dans la prière. Mais comme chaque fois qu’un sentiment de défaite l’envahissait, le Christ la consolait et l’appelait de nouveau.
Même une fois ses vœux prononcés, elle avait dû faire face à son plus grand échec. L’évêque de Codogno, monseigneur Gelmini, séduit par la foi et la droiture de la jeune sœur Françoise-Xavière, l’avait nommée supérieure de la Maison de la Providence. Mais révoltées par cette décision, les deux autres sœurs plus âgées de la petite communauté avaient refusé d’obéir. Cette histoire avait fini par l’excommunication des deux insoumises et à la dissolution de la Maison.
Est-ce un ordre ou une suggestion, votre éminence ?
Encore à ce jour, c’est un souvenir amer pour mère Cabrini. Mais comme d’habitude, le Christ était venu lui murmurer des mots réconfortants à l’oreille et lui redonner courage. Depuis, elle avait établi l’ordre des sœurs missionnaires du Sacré-Cœur, ouvert de nombreuses écoles et orphelinats ainsi que quelques couvents en Lombardie. Et la voici face à un nouvel obstacle. La frustration est bien présente, mais elle ne laisse rien paraître. Le combat n’est jamais perdu avec le Seigneur à ses côtés.
Tout cela, le cardinal Parocchi l’ignore. Mais un frisson le parcourt lorsqu’enfin, la petite religieuse lui demande ceci.
– Est-ce un ordre ou une suggestion, votre éminence ?
Il n’y a rien de logique ou de quantifiable à cette impression presque menaçante. C’est comme si un géant invisible se tenait derrière mère Cabrini. Un géant qui jamais ne la laisserait tomber. Et le cardinal peut presque voir l’audace se dégager d’elle.
– Une suggestion, répond-il après un long silence.
L’audace de mère Cabrini la conduira bien plus loin que ne l’imagine le cardinal. Un mois plus tard, c’est le pape Léon XIII qui l’envoie elle et ses sœurs aux Etats-Unis afin d’assister et redonner espoir aux migrants des communautés italiennes. Aussitôt arrivée, l’archevêque de New York veut la renvoyer, l’estimant lui aussi trop fragile. Elle refuse.
L’œuvre des sœurs missionnaires devient rapidement indispensable pour les immigrants italiens. Elles se font infirmières, enseignantes et guides spirituels. Mère Cabrini ouvre de nouvelles écoles, des orphelinats, et même des hôpitaux, dont l’un est le fameux hôpital de Colomb. Son œuvre permet de raviver la foi auprès de ses patients et elle mendie même pour les plus pauvres.
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Mais New York n’est qu’une ville. C’est le monde que veut conquérir mère Cabrini avec l’amour du Christ. Il y a tant à faire en si peu de temps…
Si mère Cabrini ne se rendra jamais en Chine avant de s’éteindre le 22 décembre 1917 à Chicago, son œuvre ne passera pas inaperçue. Elle sera canonisée par Pie XII le 13 novembre 1946. Sainte Françoise-Xavière Cabrini est la sainte patronne des immigrants, des hôpitaux et de l’administration.