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La qualité des repas, la quantité de boissons ou la coupe et la couleur des vêtements adaptés à la taille des frères, voilà quelques-uns des détails plutôt surprenants trouvés au fil des pages de la Règle de saint Benoît. Sans parler d’autres détails encore plus succulents ! Une règle monastique antique, certes, mais qui allie recherche spirituelle et attention au bien-être concret des membres de la communauté. Recherche du Ciel, certes, mais véritable enracinement en cette terre bénie ! C’est peut-être ce qui surprend le plus celui qui se plonge pour la première fois dans ce monument de la spiritualité chrétienne : une spiritualité très incarnée. Il s’agit en effet de vivre la charité au plus près des personnes et des choses, sans rien négliger des petites réalités qui font notre vie quotidienne.
Une sagesse incarnée
Ce principe d’incarnation interroge toujours et encore notre culture contemporaine si souvent happée par le virtuel. À l’égalité stricte, Benoît préfère la norme des Actes des Apôtres : « On donnait à chacun selon ses besoins » (c’est Marx qui a copié !). Il ne nie pas les jalousies et les rivalités que cela peut entraîner, mais en fait un test de maturité humaine et spirituelle. À la tentation de rendre justice vite et fort, il oppose la fragilité « du vase rongé par la rouille » et du « roseau brisé » qui risquent de se rompre à jamais. À ceux qui croient savoir et s’appuient sur leur expérience du passé, il oppose la fraîcheur du nouveau venu qui sait encore envisager tous les possibles.
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S’il demande aux plus jeunes de respecter les plus âgés et d’en prendre soin, Benoît demande à ces derniers d’aimer avec tendresse ceux qui viennent d’arriver. Pas de conflits de générations, mais une belle émulation pleine d’attention pour les peines de chaque âge. Sa vision de l’autorité peut même nous surprendre, car l’abba, le père de la communauté, c’est d’abord celui qui bien souvent dispense de la Règle et parfois même l’adapte, lorsque le bien des frères le demande. La loi est d’abord au service de l’homme, jamais l’inverse.
Gestion de crise et miséricorde
Et puis Benoît ne craint pas les crises, crises du début, du milieu ou de la fin de vie. À chacune, il apporte non des solutions, mais des approches différentes. Il sait faire la différence entre l’entêtement stupide du transgresseur et l’incorrigible superbe. Et surtout, surtout, il ne ferme jamais la porte, jusqu’à trois fois pour celui qui s’en est allé. Benoît maître de vie, maître d’amour parce que d’abord et avant tout disciple de Jésus. C’est pourquoi il vaut la peine de s’aventurer au fil des pages et de flâner au gré des chapitres de cette règle pluri-centenaire mais toujours aussi actuelle. Car elle nous vient du cœur et parle à notre cœur.
Ta lumière sur ma route, par Guillaume Jedrzejczak, Salvator, février 2021, 256 pages, 18 euros.