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“J’ai un petit morceau de lui dans mes bras, de nouveau”, se réjouit Julie Wilson. En février 2019, son mari Travis est mort à 45 ans d’un cancer du cerveau, alors qu’ils étaient mariés depuis sept ans. Malgré le départ prématuré de Travis, Julie Wilson n’a jamais renoncé à son souhait de fonder une famille : “J’ai discerné que je voulais encore un enfant, même si cela voulait dire être maman célibataire”, confie la jeune femme au journal britannique Daily Mail. Logan est née le 9 mai 2020, sept mois après le transfert embryonnaire.
Il est tout à fait différent de gérer une situation que la vie suscite et de provoquer cette situation.
En France, Julie Wilson n’aurait pas pu poursuivre sa démarche de PMA après le décès de son époux. En effet, la loi française met en priorité l’intérêt supérieur de l’enfant. “La loi garantit à l’enfant issu de la PMA un cadre cohérent pour l’accueillir, au regard des exigences de la nature pour la procréation. Que les parents soient en vie est une de ces exigences”, rappelle Aude Mirkovic, juriste spécialiste en droit de la famille. Où serait l’intérêt d’un enfant à naître d’une PMA post-mortem ? Cette situation n’est pas comparable avec les orphelins dont le père est décédé pendant la grossesse. “Le fait d’avoir perdu son père (à la guerre ou autre) est-il donc une chance au point qu’on envisage de reproduire délibérément ce schéma ?” interroge Aude Mirkovic. “Il est tout à fait différent de gérer une situation que la vie suscite et de provoquer cette situation.”
La congélation des embryons en cause
Dès l’annonce du diagnostic de cancer, Travis et Julie ont initié une démarche de PMA. Travis a pu voir une photo de ses cinq embryons congelés peu avant de mourir. Il a proposé des prénoms, et plaisanté sur une hypothétique ressemblance avec ses embryons. Conçus et congelés du vivant de leur père, l’implantation a eu lieu plusieurs mois après le décès. “C’est la congélation des embryons qui permet à ces situations dramatiques de se produire. C’est le décalage entre la fécondation in vitro et le transfert in utero qui permet au père de décéder entre temps”, explique encore Aude Mirkovic. “Le bon sens n’invite-t-il pas alors à chercher une solution à la source, en évitant que la situation, sans issue, ne se réalise ? Autrement dit, ne faudrait-il pas mettre en œuvre tous les moyens pour éviter la congélation des embryons ?”
Et les milliers d’embryons congelés ?
Dans le cas de Travis et Julie, les embryons sont devenus orphelins après leur conception, alors qu’ils étaient congelés en attente d’une éventuelle implantation. La question n’est donc plus de décider de créer des orphelins ou non, mais de leur permettre de vivre ou non. Que choisir dans une telle situation ? En faire naître un seul, pour imiter la situation qui aurait pu se produire naturellement ? Les faire tous naître, par souci d’égalité, quel que soit l’écart croissant entre le décès et les naissances ? N’en laisser naître aucun ?
De plus, “s’il est dans l’intérêt des embryons orphelins de naître”, ajoute Aude Mirkovic, “que dire des centaines de milliers d’embryons conservés dans l’azote liquide et dont les deux parents sont bel et bien en vie ?” Car outre son utilisation pour la PMA post-mortem, la congélation embryonnaire, réalisée dans quasi tous les parcours de PMA, entraîne la création d’embryons dits “surnuméraires”. Le questionnement autour du devenir de ces embryons est vertigineux et suscite le désarroi de nombreux couples qui ne savent pas quelle décision prendre vis-à-vis de leurs embryons.
Pour en savoir plus : gènéthique.