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Les mots sont simples et chaleureux. En cette chaude matinée de juin, Véronique Devise nous accueille d’un sourire lumineux dans son bureau situé rue du Bac, au siège du Secours catholique. Un bureau qu’elle partage encore pour quelques jours avec Véronique Fayet, présidente de l’association depuis 2014 qui lui passe officiellement la main ce mardi 15 juin. “C’est encore un peu vide”, s’excuse-t-elle presque en balayant de la main le bureau dont elle n’a pas encore pris possession. Malgré un emploi du temps chronométré compte tenu de ses allers-retours entre Paris et Mont-Saint-Eloi, près d’Arras (Hauts-de-France), où elle vit, Véronique Devise prend le temps. D’accueillir d’abord, avec une simplicité que l’on devine à travers son sourire lumineux. Mais aussi d’écouter, comme en témoigne son regard clair et sans détour.
On sent rapidement chez elle une discrétion et une volonté de ne pas se mettre en avant. Quand on lui parle de ce nouveau poste à la tête du Secours catholique elle désamorce d’un sourire : “Au Secours catholique on ne prend pas de responsabilité, on répond à un appel”. Reconnaissant volontiers avoir beaucoup réfléchi et pris du recul avant de dire oui à cette mission, cette “grande mission”, elle y voit surtout “l’aboutissement de quinze ans d’engagement au sein du Secours catholique”. “Mon parcours m’a permis de bien connaître le terrain, celui du Pas de Calais, et de comprendre les pauvretés”, répond-t-elle posément. “J’ai dit oui pour continuer à lutter contre la pauvreté et ses causes mais j’ajouterai avec les pauvres. Avec et à partir des pauvres”.
Quinze ans au Secours catholique
Discrète sur sa vie personnelle, Véronique Devise, 56 ans, mère de quatre enfants et grand-mère de bientôt cinq petits-enfants, a constamment choisi d’orienter sa vie vers les plus démunis. Par son métier d’assistante sociale d’abord, qu’elle exerce depuis une trentaine d’années. “J’ai démarré au conseil départemental du Nord, dans le Valenciennois, c’est-à-dire dans une région particulièrement pauvre qui a subi la crise économique de plein fouet”, raconte-t-elle Après une dizaine d’années passées auprès des caisses de retraite complémentaire pour les Hauts-de-France, elle travaille en milieu hospitalier en pédiatrie, où elle accompagne des familles avec des enfants atteints de maladie incurable. Puis enchaîne avec une expérience dans une structure d’insertion professionnelle, une autre d’aide à la personne et une dernière consacrée à l’accueil des personnes handicapées.
“Les parents étant souvent en situation de pauvreté, quand on a des enfants porteurs d’un handicap, parfois le handicap a une origine sociale et non génétique. Elle prend son origine dans la pauvreté des familles”, raconte la nouvelle présidente du Secours catholique. “Je trouvais qu’on ne comprenait pas toujours assez la complexité de ces familles que l’on condamnait un peu vite. On signalait parfois des choses trop rapidement au niveau du service sans laisser la place à ces familles en difficulté.”
Une vie professionnelle riche, tournée vers les plus fragiles, à laquelle il faut ajouter ses nombreuses activités bénévoles et associatives. Bénévole dans une prison elle a par la suite lancé un groupe de parole pour les personnes atteintes de longue maladie incurable. Mais ce n’est que quelques années plus tard, en 2006, qu’elle entre en tant que bénévole au Secours catholique. “Par la petite porte”, comme elle s’amuse à le dire. “On m’a demandé d’animer un groupe pour des parents en situation de précarité qui étaient en difficultés éducatives avec leurs enfants”. La co-animatrice, Marie-Agnès, lui propose d’intégrer le groupe au Secours catholique. “Je connaissais de nom et j’ai accepté”.
D’abord bénévole, elle devient ensuite référente de l’Artois pour l’association avant de prendre, en 2009, la présidence du Nord-Pas-de-Calais. “J’ai beaucoup réfléchis avant de dire oui car la situation est extrêmement compliquée”, reconnaît-t-elle volontiers. “À la pauvreté liée à celle de la population du Nord qui est l’une des plus fortes de France s’ajoute la question des migrants de Calais”. Elle y fera deux mandats, de 2010 à 2016. Une expérience délicate, difficile mais qui révèle ses qualités d’écoute, d’efficacité et de proximité avec le terrain. Cette proximité avec le terrain ne l’a jamais quitté puisqu’elle a continué d’accompagner, depuis cinq ans, plusieurs familles en situation de pauvreté au sein du Secours catholique et avec qui elle travaille pour former des travailleurs sociaux. “C’est essentiel de garder un pied dans la réalité”, assure-t-elle sans détour. “Et les orientations du Secours catholique permettent vraiment de réfléchir à comment accompagner, comment remettre les gens debout”.
Il ne faut pas réduire les personnes à leurs difficultés, leurs fautes ou leurs incompréhensions.
Mesurant ses mots avec soin, Véronique Devise parle calmement, doucement. Mais ses convictions sont bien ancrées à chaque coin de phrase. Elles se devinent en filigrane. “Si on regarde dans les évangiles, songez que les trois-quarts des textes sont liés à des personnes exclues !”, dit-elle comme une évidence. Parmi les figures qui l’inspirent on retrouve saint François d’Assise “qui a su défendre les plus pauvres avec une grande humilité” lance-t-elle avec force. Mais aussi le pape François “qui a connu toutes les pauvretés dans son pays et qui a une profonde sensibilité aux plus pauvres”. “Pour moi c’est le vrai message : l’Église doit aller aux périphéries et notamment dans ces lieux où personne ne va”, reprend-t-elle. Président du Secours catholique de 2008 à 2014, François Soulage a lui aussi marqué Véronique Devise. “En voyant sa manière d’agir en tant que chrétien au niveau politique, j’ai réalisé qu’il fallait que je travaille cela, que je réussisse à assumer et témoigner de mes convictions religieuses”. D’ailleurs, pas question pour elle d’enlever le terme “catholique” du nom de l’association. “Dans le Secours catholique, le “catholique” est important ! On se pose régulièrement la question de l’enlever mais cela dit quelque chose de qui nous sommes. Il faut l’assumer tout simplement.”
C’est la parabole du Bon Samaritain que Véronique Devise évoque spontanément lorsqu’on lui demande un passage de la Bible qui l’a nourri particulièrement. “Il y a deux messages importants dans ce texte”, détaille-t-elle. “Je retiens que le plus important est d’aller vers son prochain, vers la personne souffrante”. “Ensuite, tout simplement, nous ne sommes pas seul. Le Bon Samaritain fait appel à l’aubergiste. Au Secours catholique nous fonctionnons en réseau, nous ne sommes pas isolés les uns des autres. Dans les situations les plus complexes on a besoin des autres. Seul, on ne peut y arriver”. Deux certitudes fondatrices pour Véronique Devise, présidente du Secours catholiques, qui se doublent d’une espérance : “Il ne faut pas réduire les personnes à leurs difficultés, leurs fautes ou leurs incompréhensions. En chacun de nous on peut appeler ce fond de l’homme qui est bon et qui peut donc nous donner l’espérance que le monde sera meilleur demain. Et je pense qu’il est en route”.