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La guérison des cœurs est le premier miracle de Lourdes, et c’est un hospitalier qui le dit. Francis Vanhove, retraité girondin, est hospitalier depuis près de 20 ans. Cette place privilégiée a fait de lui le témoin de grâces spirituelles et matérielles reçues dans la cité mariale. Si les pèlerinages diocésains l’amènent régulièrement à la Grotte, son lien avec le sanctuaire est tout personnel : “C’est là-bas que mon père a reçu une grâce de guérison physique”, se rappelle-t-il ému.
Pour la famille qui passe ses vacances dans la vallée d’Argelès-Gazost, Lourdes est le lieu de sortie incontournable. “Les jours de mauvais temps, maman improvisait un petit tour au sanctuaire.” Le circuit est bien défini : visite de la basilique du Rosaire, montée des grandes arches, tour de la basilique supérieure, “éventuellement un chemin de croix”, avant de terminer avec le “passage à la grotte bénie et aux robinets”.
Années après années, tous les Vanhove font le petit tour. Si Robert, le papa ne pratique plus la foi de son baptême, il se rend tout de même avec son épouse, et leurs six enfants au sanctuaire.
L’extraordinaire surgit dans l’ordinaire
“Vers 40 ans, papa a développé une maladie de la peau. Elle touchait d’autres hommes de la famille mais pour lui, la chair des paumes de ses mains, était à vif, se souvient Francis. Parce que la peau ne se reconstruisait plus, il fallait lui bander les mains”. Rendez-vous chez le dermatologue, prescriptions médicales : du jour au lendemain, la vie de la famille change. “Ne pouvant plus conduire, papa a acheté une voiture américaine et maman a pris le relais avec cette voiture à boîte automatique.”
Lorsque la famille retourne à Lourdes à la fin de l’été 1960, elle ne déroge pas à la tradition. “Nous voilà tous en rang d’oignons à faire le fameux circuit qui se termine aux robinets qui distribuent l’eau miraculeuse. Maman fait enlever ses gants à papa pour qu’il passe ses mains un instant sous l’eau…” Après ce passage obligé, direction la pension de famille. “Le soir, maman a talqué les mains de papa, se rappelle Francis Vanhove. Elle a refait les bandages comme à son habitude en remarquant déjà que quelque chose changeait.”
La plus grande guérison physique ne suffira jamais mais une conversion du cœur suffit pour la vie éternelle. Et Lourdes est un lieu de guérison des cœurs et des corps, il faut les corréler.
Quelle n’est pas leur surprise quand le lendemain matin, la chair est complètement reconstruite au niveau des mains. “Maman s’apprêtait à lui passer l’onguent de la journée mais… Il n’en avait plus besoin. Et jamais plus, il n’a eu à le faire.” Oubliés les gants et les bandages, la guérison qui s’est opérée semblait définitive.
La guérison, un signe divin
Cette permanence de la guérison fait partie des critères qu’étudie le comité médical international de Lourdes pour constater ce qu’un évêque qualifiera de miracle. “Les critères qui font d’une guérison potentiellement miraculeuse ce que nous appelons, nous médecins, guérison inexpliquée en l’état de nos connaissances sont au nombre de sept, commence Alessandro De Franciscis, médecin et président du bureau des constatations médicales du sanctuaire. Deux sont en relation avec la maladie, quatre sont en relation avec la guérison et le dernier est un critère général.”
Chaque année, le médecin recueille une centaine de témoignages de personnes qui s’estiment miraculées. Mais il reconnaît que ce nombre ne recouvre pas parfaitement la réalité . “Il y a trois conditions dans lesquelles je peux “perdre” des cas de guérison inexpliquée. Soit la personne aurait pu déclarer sa guérison mais n’avait jamais entendu parler du bureau des constations médicales, soit elle déclare auprès de moi sa guérison, j’en prends note mais je ne recevrai jamais les documents dont j’ai besoin pour bâtir un dossier médical à étudier. Il se peut aussi qu’elle ne souhaite pas la déclarer par peur d’une intrusion dans sa vie privée ou bien car elle préfère garder ce don de la guérison comme un évènement personnel de sa vie spirituelle.”
La force des sacrements
Si Francis Vanhove a été témoin de l’une de ces guérisons qui ne font pas de bruit durant son enfance, il la redécouvre à l’âge adulte.“On est en 1999, quelques semaines avant le grand passage de mon père. Il nous rappelle sa belle histoire avec son immense sourire”. Une grâce qu’il avait tue pendant près de 40 ans “par pudeur”. Le déclic pour en parler, c’est une autre grâce, spirituelle cette fois, qui l’a déclenché. “Papa a fait un pèlerinage à Lourdes en juillet 1999 et j’étais son hospitalier attitré. Un jour, il a demandé à se confesser avant la messe : c’était la première fois que je voyais cela. Il a reçu le sacrement de réconciliation et une heure plus tard, c’est le Cardinal Eyt qui lui a porté la communion sur son brancard”, se remémore Francis. Au retour de Lourdes, son père est un homme transformé. Il rendra l’âme quelques mois plus tard “dans une sérénité totale”.
Chapelain depuis cinq ans, le père Don Anne-Guillaume observe avec la même joie les transformations qui s’opèrent dans les sacrements. “Si 70 miraculés sont officiellement reconnus, les grâces de conversion et de guérisons spirituelles ne manquent pas. La chapelle de la réconciliation est le plus grand lieu de guérison”, explique-t-il. Lorsqu’il accueille les pèlerins, le prêtre leur rappelle que guérison spirituelle et physique manifestent “la proximité du Royaume”. Dans l’épisode de la guérison du paralytique (Lc 5, 17-25), la maison est le symbole de l’Église. Et Jésus, l’Évangile le souligne, opère des guérisons par la puissance du Seigneur pour tout le monde. “Le paralytique est en fait celui qu’il reste à guérir et Jésus lui dit que ses péchés sont pardonnés. C’est ce qu’on voit à Lourdes tous les jours : la proximité du Royaume par les guérisons. La Vierge Marie n’a parlé que de ça, en appelant à la pénitence, cela sous-entend que le Royaume de Dieu est tout proche.” 163 ans après les apparitions, Lourdes demeure un lieu de grâces. Qu’elles se manifestent de manière physique ou restent toute spirituelle et intérieure.