Le Livre de l’Apocalypse demeure le texte biblique le plus mystérieux. Et pour cause, il évoque, contrairement aux autres textes, des temps qui ne sont pas encore arrivés. Tout commence quand l’apôtre Jean, exilé sur l’île de Patmos, reçoit la révélation de l’Apocalypse. Jésus ressuscité lui apparaît et lui délivre un message à destination de sept églises, situées dans l’actuelle Turquie. Message qui peut paraître mystérieux et abscons aujourd’hui, mais qui s’appuie pourtant sur des faits réels. Il est souvent question de manquements à la foi, d’une perte d’amour pour le Christ, “leur premier amour”. Le réalisateur suisse s’est donc rendu dans ces sept églises pour tenter de comprendre.
Cette recherche a donné lieu à la série de documentaires en neuf épisodes “Les 7 églises de l’Apocalypse”, sortie en 2020. Elle vient d’être condensée en trois documentaires qui sortiront successivement sur grand écran. Le premier volet nous plonge au Ier siècle en Asie Mineure, au temps où les apôtres commencent l’évangélisation des peuples juif et païen. Le christianisme se propage alors rapidement, dans l’ombre de l’Empire romain. À grand renfort d’intervenants spécialisés sur la question, religieux ou théologiens, mais aussi d’historiens fins connaisseurs de cette époque et de ces lieux, le spectateur se rend vite compte que l’on ne connaît rien à l’origine des textes de l’Apocalypse. Et son histoire, aussi passionnante que le message délivré par les textes, nous rappelle à quel point la foi chrétienne s’est forgée dans l’épreuve.
Dès lors, le réalisateur se déplace de ville en ville, en quête des signes des premiers apôtres et des références concrètes citées dans l’Apocalypse. La Rome antique et ses divinations, des cultes jusqu’à la magie noire, sont le théâtre de bien des déviances. Celles, justement, dont se détournent certains pour embrasser la foi chrétienne. Parfois au péril de leur vie.
De la prophétie des fins dernières aux martyrs d’aujourd’hui, tous peuples confondus, un même fil rouge semble perpétuer l’épreuve du feu.
L’atmosphère de l’époque est impressionnante, les enjeux politiques et économiques de l’avènement de la foi chrétienne également. Si peu de temps après la mort et la résurrection du Christ, l’évangélisation des apôtres a littéralement permis de conjurer une partie du mal sur les terres d’Asie Mineure, provoquant également des massacres, souvent innommables. De la prophétie des fins dernières aux martyrs d’aujourd’hui, tous peuples confondus, un même fil rouge semble perpétuer l’épreuve du feu. C’est-à-dire le sacrifice de sa vie face aux forces du mal. Chez les chrétiens, le martyre n’a cessé depuis les toutes premières communautés. Et il existe encore aujourd’hui. Mais les Juifs, les Yézidis, les Ouïghours, eux aussi ont affaire au mal — à l’Antéchrist, ce visage diabolique qui se fait passer pour le bien.
Entre de belles illustrations graphiques, des plans de tous les lieux cités, un rythme et une musique qui nous plongent littéralement au cœur de cette histoire, ce documentaire est vraiment passionnant. Historique, théologique et à la fois sociologique, il rend bien compte du contexte de l’époque, tout en évoquant des parallèles avec l’histoire récente de l’Occident ; mais aussi du paradoxe du texte de l’Apocalypse, à la fois source d’espérance et d’inquiétude. L’épreuve du feu est toujours actuelle et la parole du Christ qui apparut à Jean, alors vieillissant sur l’île de Patmos, s’adresse encore à tous les peuples et à tous les chrétiens. Puisque ses mots sont avant tout universels.
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