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Pour Jésus, ce jour-là, c’est un retour à la source. Certes, il n’est pas né à Nazareth, mais c’est son berceau familial et c’est là que, revenu d’Égypte, il a passé toute sa jeunesse. Dans le village, tout le monde le connaît, ou du moins, croit le connaître. Un jour, les villageois ont commencé à entendre parler de lui par la rumeur publique : l’enfant du pays, paraît-il, prêcherait dans les synagogues de la région d’une façon telle que les gens en sont bouleversés. Le petit Jésus serait-il devenu un orateur brillant, un prédicateur génial, une star ? Aussi, quand celui-ci revient à la maison, la nouvelle s’en répand comme une traînée de poudre, et tout le village ce samedi-là se presse dans la synagogue pour le voir et l’entendre. Que va-t-il faire… que va-t-il dire ?
À la source de l’espérance
On ne sort pas indemne d’un retour à la source. Revenir sur le lieu où l’on a grandi fait remonter à la surface des souvenirs, heureux ou tristes, et nous confronte à nos échecs autant qu’à nos réussites. Le temps a passé : qu’avons-nous fait de l’idéal de notre jeunesse ? C’est pour cela que, lorsque le scribe Esdras fait cette longue homélie — de six heures environ, « depuis le lever du jour jusqu’à midi ! » — en lisant et en commentant le texte de la Loi, le Peuple explose de tristesse (Ne 8, 9). Il prend conscience du décalage entre les commandements de Dieu et les petits accommodements de sa vie. Ce retour à la source de la foi d’Israël est vraiment pris au sérieux, et il faut toute l’énergie d’Esdras pour calmer la peine de son auditoire : « La joie du Seigneur est votre rempart » (Ne 8, 10) contre le désespoir et le découragement !
Jésus ne se contente pas de revenir à la source de son enfance, mais aussi à la source de l’espérance d’Israël.
Jésus ne se contente pas de revenir à la source de son enfance, mais aussi à la source de l’espérance d’Israël. Le texte d’Isaïe qu’il lit dans la liturgie de ce sabbat est une ancienne prophétie : un jour, viendra le Messie, consacré par l’onction — ce sera donc un roi, investi de l’autorité de Dieu lui-même — et avec lui, tout changera, il apportera à son peuple une véritable recréation. Cela faisait sept siècles que cette prophétie était lue dans l’assemblée des fidèles et, à la longue, cette promesse de la venue du Messie était devenue une Arlésienne : cela fait si longtemps qu’on l’annonce que l’on n’y croit plus. Ce beau texte ne serait-il pas, au fond, qu’un joli poème, une invitation à la charité réciproque, et rien d’autre ?
Tout est transformé
Soudain, les habitants de Nazareth comprennent pourquoi la prédication de Jésus a tant bouleversé de monde sur son passage : c’est que, dans un style d’une absolue simplicité, sort de sa bouche une parole qui unifie. Qu’on me pardonne de le dire : la précédente traduction de l’évangile exprimait mieux l’accomplissement de la promesse qui se produit en un instant. « Cette Parole de l’Écriture que vous venez d’entendre, c’est aujourd’hui qu’elle s’accomplit » (Lc 4, 21). Vous venez de l’entendre, il y a un instant, c’était un vieux texte : un instant après, elle est la plus actuelle, la plus présente, la plus nouvelle de toutes les bonnes nouvelles. La promesse du Messie s’accomplit en la personne de Jésus, l’Ancien Testament passe le relais au Nouveau, tout est soudainement transformé.
Voici presque deux mille ans que, de génération en génération, les chrétiens tâchent d’être les témoins de la nouveauté inépuisable de cette Parole vivante et vivifiante qu’est Jésus-Christ en personne. À leur tour, ils peuvent dire : « L’Esprit du Seigneur est sur moi… » (Lc 4, 18), car ils ne sont pas seuls, livrés à leurs seules forces, dans cette mission de témoignage. Saint Luc, au début de son évangile, détaille sa méthode et dit comment lui aussi est remonté à la source pour écrire son évangile : une enquête minutieuse, une collecte des souvenirs, et la rédaction d’un texte pour Théophile, cet « ami de Dieu » que nous sommes, chacun de nous, appelés à devenir (Lc 1, 1-4).
L’appel d’Irénée
Au cœur de cette semaine de prière pour l’unité des chrétiens et quelques jours avant ce dimanche de la Parole de Dieu, le pape François a proclamé vendredi 21 janvier docteur de l’Église saint Irénée de Lyon. Ce doctorat n’est pas une sorte de Légion d’honneur — dont on n’a a priori pas besoin au Paradis — mais un signe donné à toute l’Église. Irénée a été un serviteur infatigable de la transmission de la vérité du Christ à une époque où fleurissaient les hérésies, ces corruptions ésotériques de l’évangile. Il a invité les chrétiens confiés à sa charge pastorale à revenir aux sources de leur foi, à la « règle de foi », celle des apôtres. Il les a appelés, eux aussi, à vivre selon l’Esprit Saint qui est l’acteur de la Tradition de son Église : « Cette foi, que nous avons reçue de l’Église, nous la gardons avec soin, car sans cesse, sous l’action de l’Esprit de Dieu, tel un dépôt de grand prix renfermé dans un vase excellent, elle rajeunit et fait rajeunir le vase même qui la contient. » Que saint Irénée nous aide à prendre la Parole de Dieu au sérieux, sans pleurer nos infidélités mais en nous réjouissant d’être ces vases fragiles qui s’imbibent petit à petit de la senteur du parfum de grand prix qu’ils contiennent. Que la Parole de Dieu vivante aujourd’hui en nous soit la source de notre unité !