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Une Église humiliée, en face de ses responsabilités

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Tiziana FABI / AFP

Le pape François ouvre le symposium sur le sacerdoce, à Rome, le 17 février 2022.

Benoist de Sinety - publié le 20/02/22

Curé de la paroisse Saint-Eubert de Lille, le père Benoist de Sinety commente chaque dimanche l’actualité de l’Église et du monde. Il revient cette semaine sur deux épisodes humiliants, qui ont éprouvé l’Église, mais dont il faut tirer les leçons.

Un sage jésuite me rapportait il y a quelques jours ces mots entendus de la bouche du cardinal de Lubac au début des années quatre-vingt : « L’Église est comme un champ de ruines… Nous sommes chacun devant des pierres que nous pouvons relever… » Nous sommes loin de la vision un peu prométhéenne d’un François d’Assise qui se voyait à lui seul confier la mission de rebâtir une chapelle à l’abandon, dans laquelle la générosité de sa jeunesse lui donnait de percevoir un horizon plus universel. Ces mots du grand théologien français résonnent ces jours-ci étrangement devant deux faits divers plutôt triviaux.

L’Église humiliée

Le premier concerne une vidéo publiée sur les réseaux sociaux de deux jeunes garçons de 18 ans se trémoussant, nombril à l’air, dans la chapelle d’une église parisienne au son d’une musique sans grand intérêt. L’image, assez peu esthétique, choque et provoque l’irritation de nombre d’internautes. Les uns fustigent, les autres morigènent. Quelques-uns insultent et menacent… Mais le plus frappant, à mes yeux, fut de constater dans les heures qui suivirent, le nombre d’« influenceurs », croyants ou non, qui s’adressèrent directement à ces jeunes, sans invective ni méchanceté, pour les inviter à se reprendre, à grandir, et — c’est le cas des croyants — pour tenter de leur faire comprendre que cette chapelle pourrait être pour eux bien plus qu’un dance floor, un lieu de vraie Rencontre.

Une autre affaire, plus sordide encore, est la participation au symposium romain sur le sacerdoce d’un prélat poursuivi depuis plusieurs années par la justice de l’Église au sujet de plaintes adressées à son encontre par différentes personnes. La Croix, à ce sujet, expliquait ce vendredi 18 février qu’il s’était inscrit comme participant à cette assemblée et que l’organisme qui gère les inscriptions de tout ceci est une entreprise privée qui n’a pas connaissance des « dossiers » éventuels des ecclésiastiques qui se présentent. Il ne reste plus qu’à espérer que des « faux » prêtres n’ont pas profité de cette étonnante absence de vigilance dans un monde pourtant habituellement si ordonné… Le simple fait de vérifier sur Internet l’identité les impétrants aurait permis de déclencher quelques alarmes. Pratique devenue par ailleurs courante outre-Atlantique pour tout prêtre désireux de prendre part à une manifestation publique…

Reconnaître le scandale

Pourquoi relier ces deux petites affaires ? Parce qu’elles nous mettent en face de nos responsabilités. Tant que nous n’aurons pas eu le courage de nous engager de manière non seulement déclarative mais en actes, dans la reconnaissance de ce qu’il faut convertir dans l’organisation de l’Église, des jeunes écervelés continueront, de plus en plus nombreux, à confondre nos chapelles avec des lieux de jeux. Comment respecter le message lorsque les messagers se décrédibilisent ?

Oui, le champ de ruines est vaste. Mais nous sommes nombreux, baptisés, à souhaiter, chacun, ardemment, redresser la pierre écroulée devant nous.

Saint Ignace de Loyola parlait de l’humilité comme d’un chemin d’humiliations. Nous avons, reconnaissons-le, du mal à accepter que notre discours humble et contrit puisse s’accompagner d’humiliations. Mais ce n’est qu’à ce prix que nous pourrons advenir à ce que nous devons être. Non en acceptant tout et n’importe quoi, mais en ne permettant pas d’abord que ceux qui font n’importe quoi puissent continuer à pérorer comme s’ils ne se considéraient pas concernés par cette phrase de l’Évangile : « Malheur à celui par qui le scandale arrive ! »

Redresser la pierre écroulée

Ce qui me frappe, donc, dans les réactions de nombre de mes frères et sœurs baptisés après ce clip provoquant, c’est le message de miséricorde qu’ils envoient à son auteur. Elle est belle l’Église lorsque des jeunes parlent ainsi à d’autres jeunes. Lorsque l’on sent dans leurs paroles non le désir d’en découdre, mais la soif de manifester à celui qui semble un peu perdu, de quel amour il est aimé. On est loin des paroles pieuses que certains prononcèrent au sujet de la triste affaire romaine, en expliquant que Jésus, lui, n’hésitait pas à partager un repas avec les pécheurs… Comme si la certitude de l’amour de Dieu devait exonérer le pécheur de toutes les conséquences de son péché, à commencer par l’obligation morale de ne pas blesser davantage les victimes de ses actes passés.

Oui, le champ de ruines est vaste. Mais nous sommes nombreux, baptisés, à souhaiter, chacun, ardemment, redresser la pierre écroulée devant nous. Elle est à notre taille, pourvu que nous œuvrions ensemble, sans oublier notre péché, en nous confiant les uns les autres à l’Esprit qui jaillit et décuple les forces de ceux qui savent que, seuls, ils ne sont pas grand-chose.

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