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Chez Thérèse de Lisieux, tout est finalement un peu à l’envers. Alors que la vision traditionnelle de la sainteté est comparée à l’ascension d’une montagne bien escarpée, la petite Thérèse a eu l’intuition d’atteindre le Ciel d’une manière opposée : au lieu de gravir les marches du “rude escalier de la perfection”, elle veut prendre… l’ascenseur. Rien d’étonnant : c’est à son époque que l’ascenseur apparaît comme une invention technologique qui fait rêver tout le monde :
“Je veux chercher le moyen d’aller au Ciel par une petite voie bien droite, bien courte, une petite voie toute nouvelle. Nous sommes dans un siècle d’inventions, maintenant ce n’est plus la peine de gravir les marches d’un escalier, chez les riches un ascenseur le remplace avantageusement. Moi, je voudrais aussi trouver un ascenseur pour m’élever jusqu’à Jésus, car je suis trop petite pour monter le rude escalier de la perfection.
Alors j’ai recherché dans les livres saints l’indication de l’ascenseur, objet de mon désir, et j’ai lu ces mots sortis de la bouche de la Sagesse Éternelle : Si quelqu’un est tout petit, qu’il vienne à moi.
Alors je suis venue, devinant que j’avais trouvé ce que je cherchais et voulant savoir, ô mon Dieu ! ce que vous feriez au tout petit qui répondrait à votre appel, j’ai continué mes recherches et voici ce que j’ai trouvé : – Comme une mère caresse son enfant, ainsi je vous consolerai, je vous porterai sur mon sein et je vous balancerai sur mes genoux ! Ah ! jamais paroles plus tendres, plus mélodieuses, ne sont venues réjouir mon âme, l’ascenseur qui doit m’élever jusqu’au Ciel, ce sont vos bras, ô Jésus !” (Histoire d’une âme, le Manuscrit C).
Les cinq étages pour monter au Ciel
Thérèse a cette intuition que malgré sa petitesse, elle peut aspirer à la sainteté en prenant l’ascenseur qui sont les bras de Jésus. C’est ainsi qu’elle découvre sa “petite voie” pour atteindre le Ciel. Comme l’explique Jacques Gauthier dans sa tribune pour Aleteia, Thérèse trouve sa joie à “se laisser porter par son Dieu. Son seul mérite est… de ne pas en avoir”, écrit-il. Alors concrètement, comment la suivre ? En prenant les cinq étages de son “ascenseur spirituel” :
Étage 1Avoir l’esprit d’enfance
Thérèse a compris : pour monter au Ciel, il faut devenir comme des enfants. Mais attention, sa « petite voie » de l’enfance spirituelle est tout sauf de l’infantilisme ! Il s’agit de cultiver un esprit d’enfance, c’est-à-dire désirer les plus grandes choses, mais en s’appuyant entièrement sur Dieu. C’est finalement se jeter dans ses bras comme un enfant se jette dans les bras de sa mère. Dieu est pour Thérèse comme premier, dernier et unique recours.
Étage 2Faire confiance aveuglément au Père
« J’ai toujours constaté, lorsque je me suis comparée aux saints, qu’il y a entre eux et moi la même différence qui existe entre une montagne qui se perd dans les cieux et un grain de sable obscur foulé sous les pieds des passants », écrit-elle. Mais au lieu de se décourager, la petite Thérèse sait comment atteindre la sainteté : en ne lâchant pas le Père. Paradoxalement, en grandissant, il n’est pas question de prendre son indépendance, mais de faire confiance aveuglement à Dieu et de tout attendre (et sans complexe) de Dieu. Plus on s’y abandonne, plus on s’ouvre à son amour et plus on monte vers le Ciel.
Étage 3Accueillir ce qu’il vient
Thérèse l’a saisi. Elle a été initiée par sa sœur Marie à la valeur des petites choses – celles qui semblent ne pas en avoir – au réel prix qu’elles ont lorsqu’elles sont faites avec fidélité et amour. Pour la carmélite c’est à travers elles et dans l’instant présent qu’on peut monter encore plus haut pour rejoindre le Ciel. Comment ? Il faut « faire de manière extraordinaire des choses tout ordinaires ! », conseille-t-elle.
Étage 4Choisir de rester petit
Ne pas vouloir être grand – ni un grand mystique, ni un grand saint, ni quelqu’un qui ressuscite les morts, qui chasse les esprits, qui évangélise, etc. Pour Thérèse, l’orgueil peut se cacher dans tout désir de grandeur. Pour elle, la clé est d’être comme un “petit rien”. Pas facile d’atteindre ce niveau, car rester petite et l’être de plus en plus, ce n’est pas une invitation à la puérilité ou à la passivité. C’est s’appuyer sur sa faiblesse pour rendre témoignage à l’amour de Dieu ! C’est se laisser aimer gratuitement dans l’humilité ! C’est enfin, à travers cette faiblesse assumée, s’offrir pleinement à Dieu.
Étage 5Goûter à la miséricorde divine
Thérèse l’a bien compris : c’est le refus de sa miséricorde qui blesse le plus Jésus. La clé n’est pas de faire beaucoup, mais d’aimer beaucoup. Par sa « petite voie », Thérèse montre le vrai visage de Dieu : visage de bonté, de tendresse et de miséricorde.
« Je t’assure que le Bon Dieu est bien meilleur que tu le crois. Il se contente d’un regard, d’un soupir d’amour… Pour moi je trouve la perfection bien facile à pratiquer, parce que j’ai compris qu’il n’y a qu’à prendre Jésus par le cœur…” (LT 191) Selon Thérèse, pour monter au Ciel, il s’agit de miser tout sur la miséricorde divine et de remplacer l’image du Dieu justicier par l’image d’un Dieu miséricordieux qui n’est qu'”amour et miséricorde !” (LT 266)