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Les religions occupent une place particulière en Chine, pays officiellement athée et tenu par le Parti communiste. Néanmoins, en plus de l’idéologie de l’État, la pratique religieuse existe et elle se montre extrêmement variée. L’enquête Measuring religion in China, réalisée par le Pew Resaerch center, parue en août 2023, est l’une des plus riches à ce jour pour comprendre la place de la religion en Chine. Enquête difficile, car il n’existe pas de statistiques libres dans ce pays et qu’il n’est pas possible à des groupes étrangers d’enquêter librement dans le pays. Le Pew a donc collecté des données produites par des centres de recherche chinois, ce qui limite parfois l’analyse.
Religion d’Occident et d’ailleurs
Le premier écueil d’une telle enquête réside dans la définition donnée à la notion de “religion”, le terme n’ayant pas le même sens dans le monde chrétien et dans le monde chinois. En Chine, et plus largement en Asie, la religion est tout autant un rattachement à un mouvement, une “église”, qu’une adhésion philosophique et des pratiques culturelles. La visite des tombes et la pratique du feng-shui [la décoration de son intérieur, ndlr] relèvent ainsi de la pratique de la religion.
Ainsi, relève l’enquête, parmi la population adulte chinoise, un tiers dit croire en bouddha, un quart fait régulièrement brûler de l’encens afin de s’attirer les aides des divinités, 20% croient dans le taoïsme, mais seulement 10% disent avoir une religion. Preuve que rattachement religieux et pratiques religieuses ne sont pas compris de la même façon en Chine et en Europe. Le terme chinois pour “religion”, zongjiao désigne les cultes structurés et organisés, encadrés par un clergé. Ce qui correspond au christianisme, mais pas aux pratiques religieuses culturelles chinoises.
Dans les médias contrôlés par l’État, la religion est présentée comme une superstition qui conduit à la corruption et à la déloyauté envers le Parti.
Pour beaucoup de Chinois, ces pratiques ne relèvent pas de la religion, mais de la coutume. Dans les médias contrôlés par l’État, la religion est présentée comme une superstition qui conduit à la corruption et à la déloyauté envers le Parti. Un terme éminemment négatif dont on comprend qu’il ne soit pas revendiqué. La croyance dans les esprits, la visite des sanctuaires et les offrandes aux ancêtres, vue comme des pratiques religieuses en Occident, ne sont pas perçues comme telles en Chine, mais plutôt comme des pratiques culturelles. Les frontières entre bouddhisme, confucianisme, shintoïsme, taoïsme et divinités locales étant floues, les populations peuvent pratiquer l’un et l’autre sans considérer appartenir à une religion formelle.
Restrictions de l’État face aux religions
Officiellement, le gouvernement reconnaît cinq religions : le bouddhisme, le catholicisme, l’islam, le protestantisme et le taoïsme. Mais il surveille de près leurs lieux de culte, la nomination des membres du clergé et leur financement. De nombreuses activités susceptibles de contribuer au maintien ou à l’expansion de ces cinq groupes sont interdites, notamment le prosélytisme et l’éducation religieuse pour les enfants. Dans plusieurs régions chinoises, les enfants n’ont pas le droit d’entrer dans les églises et des parents ont été dénoncés pour avoir donné des cours de catéchisme. Cela conduit à une clandestinité qui ne facilite pas la recension et la compréhension des pratiques chrétiennes.
Depuis l’arrivée au pouvoir de Xi Jinping (2012), les fonctionnaires locaux sont beaucoup plus zélés pour contrôler les cultes, réprimer les récalcitrants, faire appliquer les lois restrictives. La volonté de Xi de “siniser” les religions, c’est-à-dire les aligner sur le Parti communiste, a conduit à un renforcement de la répression. En dépit de l’accord avec le Saint-Siège, le gouvernement a arrêté des évêques et des prêtres catholiques dits “clandestins”, c’est-à-dire non affiliés à l’Association patriotique catholique chinoise officielle. Une répression identique s’est abattue sur les protestants qui fréquentent des lieux de culte non autorisés.
La politique du Saint-Siège
Pour toutes ces raisons, il est impossible de connaître avec précision le nombre de chrétiens présents en Chine. Selon les études, ce chiffre varie de 2% à 9% de la population chinoise. Ce qui n’exclut pas les Chinois qui se revendiquent chrétiens tout en pratiquant les rites et cultes traditionnels, cela n’étant pas incompatible à leurs yeux, puisque non assimilés à une religion.
Les catholiques chinois sont essentiellement présents dans les régions littorales (Guangdong, Fujian et Zhejiang) et dans quelques régions centrales autour de Pékin. Dans ces régions, ils représentent 5% à 13% de la population, mais ils sont quasiment absents partout ailleurs. Ce rapport particulier des Chinois à la religion, la mainmise du Parti communiste, la répartition des catholiques sur le territoire, rend difficile la politique chinoise du Saint-Siège. Disposant de peu de leviers et de peu de relais, le Vatican n’est pas en situation de force pour imposer ses vues et doit donc tenir compte des décisions de Xi Jinping et de la politique du Parti.