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Djamel a choisi le Christ après avoir rencontré “Son” petit pauvre, saint François, au hasard d’une pièce de théâtre. Ce comédien et metteur en scène, fondateur de la compagnie “Les Tréteaux du Monde” revient de loin, et c’est lui qui le dit. “J’ai l’impression d’être un miraculé”, confie-t-il à Aleteia. Miraculé de la solitude, de l’abandon, de l’exclusion : oui, Djamel est bien un miraculé. La preuve vivante que la foi sauve.
Né à Vienne en 1959 de parents Algériens ayant fui la guerre d’indépendance, Djamel Guesmi grandit au cœur d’une famille musulmane dont la pratique se fait discrète. “Mes parents ne m’ont rien imposé. C’étaient des gens de foi, mais qui ne cherchaient pas à nous infliger un carcan quelconque”, se souvient Djamel avec émotion. En grandissant, le petit garçon bute sur ses difficultés scolaires. Orienté dès la sixième en filière professionnelle, il peine à s’exprimer et souffre de bégaiement. Il ne parvient ni à lire ni à écrire et ne décroche aucun diplôme. Le sentiment d’échec qui le saisit ne le lâche plus, un cri intérieur qu’il qualifie de “désarroi muet”. Adolescent, Djamel enchaîne les passages par les commissariats, accusé de faits dont il se dit pourtant innocent : cambriolage, vol d’un portefeuille, attouchements en bande sur une jeune fille… Il écope de prison avec sursis pour les deux premiers délits, ne sera pas condamné pour la troisième infraction.
Je ne comprenais pas le Christ, je ne faisais pas le rapprochement entre cette sérénité et la Croix. Mais que c’était doux !
À 16 ans, c’est le point de non-retour. Le jeune homme décide de tout quitter pour s’élancer, sans but, à Paris. Il part sans se retourner, et sans prévenir les siens, qui le déclarent disparu. “J’étais dans une telle impasse que la fuite était mon seul salut”, explique-t-il. “Je n’avais aucun lien social, aucune perspective professionnelle. J’étais seul. Mais je sais qu’une main protectrice jouait déjà en ma faveur à ce moment-là, même si je ne la connaissais pas encore.” Dans le grand fracas parisien, Djamel tente de se tracer une route, mais se trouve entraîné sur le chemin sinueux de la prostitution masculine, qui se mêle bien souvent à celui de la drogue. S’il ne parvient pas tout à fait à éviter la première, une pulsion de vie l’empêche de tomber dans la seconde. “Quand on m’a proposé de l’héroïne, je me suis dit : “Si j’y touche, je meurs”. Et le visage de mon père m’est apparu une fraction de seconde. J’ai reculé. Cette retenue salutaire m’a prouvé que j’avais encore conscience du bien et du mal malgré l’épreuve.” Il entre dans les églises, et y reste, parfois longtemps.
Sauvé par le “petit pauvre” du Christ
“J’y trouvais une douceur inexplicable”, dit-il, la voix soudain brisée. “Je ne comprenais pas le Christ, je ne faisais pas le rapprochement entre cette sérénité et la Croix. Mais que c’était doux !” Après sept années à enchaîner les petits boulots, Djamel passe la porte d’un cours de théâtre à l’école de Jean-Laurent Cochet. “J’avais en tête la volonté de faire un métier “public”. Je ne sais pas trop ce qui m’a amené ici”, sourit Djamel, “c’était un monde totalement étranger, et j’avais toujours de grandes difficultés à parler et à lire.” Le jeune homme se lance à l’assaut de la langue de Molière, note les mots qu’il ne comprend pas, se saisit d’un dictionnaire, les apprend par cœur. “C’est le théâtre qui m’a guéri de cette sensation d’être emmuré vivant”, affirme Djamel. Son bégaiement s’efface, sa parole se délie. Avide de comprendre ces références au christianisme dont regorge la littérature française, Djamel lit les Évangiles. Et puis un jour, c’est la révélation.
C’était la folie d’amour révélée dans toute sa splendeur.
Alors âgé de 24 ans, Djamel découvre la pièce de Jacques Copeau, Le Petit Pauvre, directement inspirée de la biographie du saint d’Assise écrite par Johannes Jørgensen. “En filigrane, j’y ai trouvé le visage du Christ”, confie Djamel. “Les propos de François étaient d’une telle force que j’en ai été immédiatement bouleversé. Je me suis senti proche de lui. Je me suis dit : François a mis ses pas dans ceux du Christ, donc si je mets mes pas dans les siens, je suivrai moi aussi le Christ. C’était extraordinaire pour un petit homme moi, car c’était la folie d’amour révélée dans toute sa splendeur.” Djamel décide de monter la pièce, qu’il joue pour la première fois en 1988 avec sa compagnie à Vézelay, incarnant François. Deux ans plus tard, c’est devant le pape Jean Paul II qu’il la joue, accompagné du parrain de sa compagnie, l’abbé Pierre.
C’est finalement en 1997 que Djamel reçoit le baptême, après un long cheminement. “Le baptême, c’est la sensation de renouveau. Ce qui a été a été, mais ce qui demeure le plus important est ce qui est, et ce qui adviendra. La prière, l’enseignement du Christ, les sacrements : j’ai tout reçu avec mon corps, mon cœur et mon âme”, témoigne Djamel. “Tout ce que j’ai vécu n’est que grâce. Dans les Évangiles, le Christ dit très souvent : va, ta foi t’a sauvé. Moi qui ai souffert, moi qui ai péché, ma foi me sauve. Je ne sais pas d’où elle vient, et je sais qu’elle est fragile. Mais elle est bien là, et le Christ la connaît.”
En pratique :
Séance de dédicace le samedi 23 mars, 16h-18h, péniche Thalassa-Quai Liberté au 6 port de Javel Haut 75015 Paris.
Pratique