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La semaine de quatre jours, un vieux marronnier du gouvernement ? C’est en tout cas une idée récurrente que le Premier ministre a ressortie des tiroirs du gouvernement. Cette fois-ci, Gabriel Attal a livré de nouvelles précisions, puisque cette mesure ne s’adresserait qu’aux parents fonctionnaires et… divorcés. Lorsqu’il était ministre délégué chargé des Comptes publics, Gabriel Attal avait déjà tenté de mettre en place dans son administration la semaine de quatre jours sans réduction du temps de travail. Pour Pascale Morinière, présidente des AFC, le Premier ministre ne répond pas au problème de fond qui est le soutien à la conjugalité qui, seul, préviendrait les séparations.
Aleteia : la semaine de quatre jours permettrait-elle aux enfants de passer plus de temps de qualité avec leurs parents ?
Pascale Morinière : Il faut bien avoir en tête qu’à nombre d’heures égales par semaine, c’est neuf heures à se répartir sur quatre jours. On se trouverait donc dans une accélération du temps, sur un temps contraint. Le sentiment de manquer de temps semble pourtant partagé par beaucoup : on a tous besoin de prendre le temps de vivre, plutôt que de chercher encore une fois à accélérer le temps. C’est assez révélateur de la politique française : tout ce qui dysfonctionne, on le compense sans jamais se donner la peine de l’anticiper, ni de le prévenir, en particulier sur les séparations conjugales. Il y a des choses à inventer, c’est certain, pour permettre aux parents de dégager du temps pour leurs enfants, plus que de concentrer sur quatre jours des semaines déjà chargées. On ne voit donc pas très bien où le Premier ministre veut en venir. Le gouvernement procède souvent comme ça, on l’a vu avec le congé de naissance : il lance un ballon d’essai aux contours flous pour voir comment l’opinion réagit. Les choses s’affinent ensuite, selon la réaction. En France, la politique ne se fait pas selon une vision précise, qui serait bonne pour le bien-commun de la société, mais selon une opinion qui accepterait ou n’accepterait pas les choses. C’est très clientéliste, puisqu’il s’agit ici de récupérer des voix chez les divorcés.
Faut-il considérer cette proposition comme une attaque contre le mariage ? Ou, au contraire, faut-il y voir une tentative de réponse aux deux sujets qu’elle convoque, que sont la natalité et l’éducation ?
Il ne faut pas voir ici une attaque contre le mariage, on n’en est même plus là. Gabriel Attal tente de trouver une solution qui lui semble coller au réel. Déjà, parce que depuis quelques années, la majorité des enfants naissent de parents qui ne sont pas mariés. S’adresser seulement aux parents divorcés est d’ailleurs un peu étonnant, puisqu’il y a aussi beaucoup de foyers dont les parents, tout en étant séparés, n’ont jamais été mariés. Je déplore en revanche le fait qu’on ne fasse rien pour, en amont, empêcher d’en arriver là. On aurait besoin de prévenir les séparations, plutôt que de les compenser. Améliorer la conjugalité et la relation au sein des couples permettrait de diminuer les séparations et de prévenir les violences et la maltraitance intrafamiliale. On accompagne les séparations, sans penser à accompagner les couples pour les empêcher de se séparer. La solution serait de proposer une préparation à la conjugalité, avant le PACS, l’emménagement ou le mariage civil. Il faut sortir de cette optique du couple jetable, qui éviterait aux familles de souffrir et au gouvernement d’avoir à composer avec tout un tas d’acrobaties pour compenser des choses qui ne fonctionnent plus.
On peut donc considérer que cette tentative de solution ne répond pas au véritable problème, qui est la séparation des couples et ses conséquences sur les enfants ?
On peut au moins dire que c’est largement insuffisant. On ne traite pas le fond du sujet : on ne fait que mettre un pansement sur un problème béant. La souffrance des parents qui se séparent porte sur l’enfant des conséquences à vie. La réponse est, à mon sens, politique : la CNAF (Caisse Nationale des Allocations Familiales) dégage des excédents, notamment parce que l’effondrement de la natalité fait que les prestations adressées aux familles sont moindres. Les 400 millions d’euros d’excédents de cette année pourraient être réinvestis dans le conseil conjugal, par exemple. Au lieu de cela, ils sont injectés dans d’autres branches de la Sécurité sociale, comme la branche autonomie qui est déficitaire à cause du vieillissement de la population, ou la branche maladie. La solution est surtout de renforcer la conjugalité : plus les couples sont stables, plus les familles sont stables et les familles stables font une société qui va mieux. C’est la notion de “liquidité des liens” de Zygmunt Bauman, ou d’amour “jetable”, pour reprendre le mot du pape François. Pourtant, mieux les enfants sont traités, plus ils réussissent à l’école. Une des raisons de l’échec scolaire est aussi la séparation des parents. On l’a d’ailleurs vu avec les émeutes, l’été dernier : même Emmanuel Macron a souligné le fait que 60% des jeunes émeutiers étaient issus de familles séparées. Les politiques sont-ils prêts à entendre notre revendication ? Pour prendre soin des enfants, de l’éducation et de la natalité, il faut soutenir les couples et prévenir les séparations.