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“Au soir de la vie, nous serons jugés sur l’amour”, écrit saint Jean de la Croix, réformateur du carmel que sœur Thérèse de Jésus, sa lointaine disciple chilienne, a chéri. Morte à 19 ans, après moins d’une année au couvent, cette ravissante jeune fille de la bonne société de Santiago semble n’avoir, à vues humaines, rien fait ou presque de sa très courte vie. Mais, s’il est vrai que l’amour sera la mesure de nos actes et de nos existences, à considérer la gloire de cette petite religieuse, en apparence si banale, devenue la patronne de son pays et l’une des plus grandes saintes d’Amérique latine, il faut croire qu’elle a, en effet, beaucoup aimé.
Dévorée du désir de communier
Lors de son baptême, deux jours après sa naissance le 13 juillet 1900, la septième et dernière enfant de Miguel Fernandez et de son épouse, couple de riches propriétaires terriens, a reçu les prénoms de Juana Enriqueta Josefina del sagrado Corazon. Il faut peut-être voir dans cette consécration immédiate au Sacré Cœur l’une des clefs de sa spiritualité d’oblation, de sacrifice et d’amour.
Élevée dans une famille pieuse, Juanita apprend toute petite à aimer la messe où elle accompagne chaque jour sa mère. Dès qu’elle est en âge de comprendre ce qu’est l’Eucharistie, elle est dévorée du désir de communier. Dès qu’elle le peut, à 10 ans, elle ne manque plus aucune occasion de le faire chaque jour. En parallèle, elle développe une vive dévotion mariale, dit quotidiennement le rosaire entier, apprend à s’oublier et se priver pour les autres afin de pouvoir faire plus et mieux la charité. À l’aumône, que ses parents pratiquent largement, en ayant les moyens, Juanita ajoute un engagement personnel, en consacrant une partie de ses vacances à enseigner le catéchisme aux enfants des employés agricoles de son père.
Une sportive enragée
Est-elle pour autant d’emblée une petite sainte désincarnée et parfaite ? Non ! Dotée d’un fort caractère, elle s’emporte pour un rien, supporte mal la contrariété, se montre coléreuse. Si elle aime la prière, elle n’y consacre pas tout son temps, loin de là, car c’est une sportive enragée, passionnée d’équitation et de natation, deux disciplines dans lesquelles elle excelle. Un temps car, à l’adolescence, sa santé se fragilise, elle est souvent malade, de plus en plus gravement. Elle a 15 ans quand, en pension, elle est victime d’une crise d’appendicite aiguë, mal à l’époque encore très grave car, même si chirurgie et anesthésiques sauvent désormais la plupart des patients, les complications infectieuses restent fréquentes et, faute d’antibiotiques, mortelles. Juana s’en tire de justesse mais reste clouée au lit de longs mois.
Plus question de nager ou monter. Pour tromper son ennui, elle lit ; les religieuses éducatrices lui offrent deux ouvrages qui auront une influence décisive : L’Histoire d’une âme de Thérèse de Lisieux et une biographie d’Élisabeth de la Trinité. Elle sort de ces lectures si bouleversée qu’elle décide d’entrer au carmel, comme Thérèse à 15 ans. Sa famille s’y oppose ; elle se soumet mais n’oublie pas son rêve. Finalement, le 7 mai 1919, elle est admise au couvent de Nuestra Señora de Los Andes, où, par respect pour la grande Thérèse d’Avila, elle prend son nom de religion : Teresa de Jésus.
Aimer pour toujours
Son noviciat passe, de l’enthousiasme des commencements, ponctué de phénomènes mystiques qui lui permettent de pénétrer les secrets du divin Cœur, à de lourdes périodes de sécheresse spirituelle quand le Bien-Aimé se dérobe et demeure caché. La découverte de saint Jean de la Croix et de la nuit de l’âme lui permet de mieux comprendre cette expérience pénible et de la surmonter. Sur le modèle de Thérèse de Lisieux, elle entame l’écriture d’un Journal, tout en trouvant le temps d’entretenir une importante correspondance, d’une grande élévation spirituelle, avec ceux qu’elle a laissés dans le monde, auxquels elle affirme qu’une “carmélite n’oublie jamais ceux qu’elle a aimés” et ne cesse de le leur prouver dans la prière.
Quoique ces écrits soient ceux d’une très jeune fille, l’on y trouve de belles inspirations, laissant entrevoir ce que sa spiritualité aurait pu devenir en mûrissant. Éperdument amoureuse du Christ, elle affirme : “Quand j’aime, c’est pour toujours.” Du fond du cloître elle se fixe pour ambition de “se sacrifier pour tous”.
Le bruit de sa sainteté
En mars 1920, sœur Thérèse se sent mal mais, fidèle à ses obligations et à la prière, fait assez bien illusion pour tromper jusqu’au médecin de la communauté qui ne s’inquiète pas ; elle lui affirme pourtant qu’elle n’a plus un mois à vivre. C’est vrai. Début avril, elle doit s’aliter et le médecin diagnostique, trop tard, le typhus ; elle est perdue.
Comme le prévoit la Règle, elle est autorisée à faire sa profession solennelle in articulo mortis et s’éteint le lendemain matin, 12 avril 1920. À peine a-t-elle rendu son dernier soupir que le bruit de sa sainteté emplit le Chili. Cette réputation ne cessera de croître. Thérèse de Los Andes est canonisée en 1993. Le miracle retenu pour cela a des allures de clin d’œil quand on se souvient de son goût pour la natation car elle ramène à la vie une adolescente victime de noyade et déclarée morte, qui s’en sort sans aucune séquelle.
Edit du 12 avril 2024