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L’interaction entre une mère et son bébé pendant la grossesse va bien au-delà de ce que l’on peut imaginer. Saviez-vous qu’il est possible de retrouver dans le corps d’une femme, des dizaines d’années après sa grossesse, des cellules fœtales de l’enfant qu’elle a porté ? Savez-vous qu’en imagerie cérébrale, il est possible de déterminer si une femme a eu ou non des enfants dans sa vie, et même leur nombre ? Si la science rapporte régulièrement des éléments stupéfiants sur les bouleversements extraordinaires de la grossesse, nous sommes sûrement encore loin de mesurer et de connaître toute la puissance et la complexité de cette expérience éminemment particulière — et toujours singulière ! — qu’on peut qualifier de “totale”. Car oui, attendre un enfant au creux de son corps est une expérience totale, au sens de globale : physique, psychique, sensorielle, émotionnelle… Une expérience qui laissera à vie son empreinte.
Dans le cerveau des mamans
Faisons d’abord ensemble un petit tour dans le cerveau des mamans, comme nous le proposent deux psychiatres spécialistes de la périnatalité dans un livre passionnant (éditions du Rocher). Ils nous permettent de percer certains mystères et d’approcher les nombreux changements structurels que la femme va vivre tout au long de la grossesse, et même après ! Petit à petit, le cerveau apprend à intégrer les modifications biologiques que le corps traverse puis à reconnaître la présence d’un autre en soi. Au fond, le cerveau s’adapte à la grossesse et ajuste ses prédictions avec la réalité des mouvements fœtaux. Ce phénomène d’”harmonisation intéroceptive” contribue à la mise en place des liens d’attachement entre la mère et son bébé.
Dès le début de la grossesse, se crée une magnifique adaptation dynamique du cerveau maternel grâce à ce qu’on appelle la neuroplasticité périnatale. C’est l’une des phases de plasticité les plus importantes qu’expérimente le cerveau de la femme adulte. Des connexions existantes entre les neurones dans le cerveau sont renouvelées, d’anciennes se défont et disparaissent, de nouvelles se forment et se renforcent. Ces changements surviennent notamment sous l’effet des hormones qui modifient la structure (taille, morphologie) et l’activité du cerveau en favorisant progressivement les comportements nécessaires aux défis liés à la maternité.
Plus sensible aux émotions
On a pu démontrer que les femmes enceintes et en post-partum sont plus sensibles aux informations émotionnelles faciales et reconnaissent mieux les émotions exprimées sur le visage des autres. Cette sensibilité accrue des mères envers leur nourrisson implique des modifications dans les régions cérébrales dites “de la récompense”. Ce changement cérébral permettra à la mère de mieux protéger et subvenir aux besoins de son enfant. Autre évolution, celle de la zone de matière grise associée à l’empathie qui subit une transformation qui perdurera après la grossesse. En parallèle, le cerveau se modifie pour que la réponse du corps au stress soit progressivement atténuée pendant la grossesse, et cela, pour protéger autant que possible la mère et son fœtus d’effets négatifs de leur environnement. Cette réactivité cérébrale maternelle modifiée peut perdurer pendant le post-partum sous l’effet des hormones de l’allaitement, ce qui contribue à une meilleure régulation des émotions négatives, pour faire face aux facteurs de stress associés aux exigences parentales.
À celles qui sont mères, se dire que quelques cellules issues de vos enfants battent peut-être en ce moment dans votre cœur de maman, n’est-ce pas sacrément émouvant ?
Toutes ces transformations du cerveau permettent aux mères de devenir davantage sensibles et réceptives aux besoins des bébés, du leur, bien entendu, mais aussi de manière générale de tous les bébés. Et plus le temps passe plus le cerveau de la maman se spécialise pour répondre aux signaux provenant de son nourrisson à elle. Cette découverte renforce l’idée d’une construction progressive du lien singulier entre la mère et son bébé, qui n’est pas établi une fois pour toutes mais commence pendant la grossesse et progresse dans les semaines qui suivent la naissance.
Un échange de cellules
Évoquons maintenant rapidement ce drôle de phénomène qu’on appelle “microchimérisme” fœtal et maternel. Derrière ce mot barbare se cache une réalité aussi étonnante que méconnue : mères et enfants “s’échangent” mutuellement des cellules qui passent la barrière placentaire. Du côté du bébé, ce passage peut concerner aussi des cellules de ses frères et sœurs déjà nés et même de sa grand-mère maternelle, restées présentes dans le corps de sa mère. Du côté de la femme, on peut retrouver des cellules issues des enfants qu’elle aura porté dans son cœur, son cerveau, ses poumons, sa thyroïde, ses seins… pendant des décennies après la naissance ! À celles qui sont mères, se dire que quelques cellules issues de vos enfants battent peut-être en ce moment dans votre cœur de maman, n’est-ce pas sacrément émouvant ?
Voilà bien une forme d’imprégnation et même de “mémoire” du corps bien particulières, encore assez méconnues, et qui apporteraient de bonnes comme de mauvaises choses, ce que des chercheurs appellent la “coopération et le conflit”. Côté bénéfices ? Ces cellules fœtales peuvent se comporter comme des cellules souches et avoir un effet réparateur sur certains lésions ou dommages dus au vieillissement. Car évidemment, il est dans l’intérêt de l’enfant d’améliorer la survie de sa mère et de contribuer à l’entretien de son corps qui assure sa propre survie ! Et en migrant dans le cerveau, ce microchimérisme serait impliqué dans la programmation de comportements maternels et même favoriserait l’attachement et la création des liens. Tout un programme !