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Sacrilège, blasphème… comment définir précisément ces actes graves ?

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Morgane Afif - publié le 13/05/24

Sacrilège, blasphème, lèse-majesté... Si ces termes désignent tous un rejet plus ou moins des vérités de la foi, ils tendent souvent à se confondre dans l'imaginaire collectif. Comment les différencier ?

Quelle est aujourd’hui la place du sacré ? Si le XXIe siècle semble sonner le temps de la désacralisation forcenée qui laisse place à une laïcisation absolue de la société, les notions de sacrilège, de sacrilège ou de lèse-majesté sont quant à elles devenues les reliquats vieillots d’un temps où l’on comptait encore la population de nos villages en âmes. Pire. Aujourd’hui, le mot fait rire tant le sacré a été dévoyé, depuis que des églises désacralisées ont été transformées en boîte de nuit et que dans les paroisses de campagne, on ne célèbre plus la messe le dimanche. Seul le blasphème défraie encore tristement la chronique quand, en son nom, un “extrémiste” comme on les appelle commet un crime de haine en son nom pour faire justice à un dieu qui ne se ferait pas justice lui-même. 


Le blasphème

En France, c’est le Moyen Âge qui voit éclore la lutte contre le blasphème, sous le règne de saint Louis au temps des croisades. Du grec βλασφημία, blasphēmía, on retrouve dans son étymologie blapein, “léser, nuire” et pheme, “réputation”. Le blasphème consiste donc à outrager Dieu, que ce soit publiquement ou dans son cœur, en proférant des paroles de haine. Le droit canon précise à ce titre que le blasphème contre l’Esprit saint consiste à refuser délibérément d’accueillir la miséricorde de Dieu par une contrition sincère : “Un tel endurcissement peut conduire à l’impénitence finale et à la perte éternelle” (CEC §1864). Sont blasphématoires également des paroles délibérément violentes prononcées à l’encontre de la Vierge Marie, des saints et des choses sacrées :

Le blasphème s’oppose directement au deuxième commandement. Il consiste à proférer contre Dieu – intérieurement ou extérieurement – des paroles de haine, de reproche, de défi, à dire du mal de Dieu, à manquer de respect envers Lui dans ses propos, à abuser du nom de Dieu. […] Il est encore blasphématoire de recourir au nom de Dieu pour couvrir des pratiques criminelles, réduire des peuples en servitude, torturer ou mettre à mort. L’abus du nom de Dieu pour commettre un crime provoque le rejet de la religion. Le blasphème est contraire au respect dû à Dieu et à son saint nom. Il est de soi un péché grave. (CEC §2148)


Le crime de lèse-majesté

Avec l’avènement de la monarchie et de la figure divine du roi, un glissement s’opère entre l’offense faite à Dieu et l’offense faite à celui qu’Il a élu pour gouverner la nation : appliqué au souverain, le blasphème devient crime de lèse-majesté. Cette nouvelle définition, qui permet au roi de s’affranchir du Pape, rend aussi possible l’institution d’une sorte de religion royale où le monarque de droit divin incarne le pouvoir céleste ici-bas. Issu du latin laesa majestas, c‘est-à-dire, littéralement, “majesté blessée”, le crime de lèse-majesté désigne tout attentat commis contre le souverain ou les signes de son autorité. L’exemple le plus effroyable fut probablement celui du supplice de Robert-François Damiens, auteur d’un attentat qui faillit coûter la vie à Louis XV le 5 janvier 1757.

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C’est avec la mise à mort de Louis XVI, le 21 janvier 1793, que le crime de lèse-majesté atteint son paroxysme. Plus que tuer l’homme, c’est surtout le corps sacré du roi et le représentant de la monarchie que le peuple révolutionnaire veut achever. Ébranlée par les guerres de Religions et la Réforme, la monarchie est abolie sur l’échafaud pour annoncer l’avènement de la République.


La profanation

On reconnaît dans le terme “profanation” le préfixe latin pro, en avant, et fanum, c’est-à-dire “temple” ou “sanctuaire” ; qui a aussi donné “fanatique”, pour désigner celui qui fait preuve d’un zèle aveugle et désordonné pour la religion. La profanation est l’action de dégrader ou d’avilir volontairement un lieu sacré, qu’il s’agisse d’une église ou d’une chapelle, ou d’un cimetière. Si la loi ne parle pas de profanation, elle punit cependant toute destruction, dégradation ou détérioration commises envers un édifice religieux (article 322-1 du code pénal) ou un cimetière (article 225-17 du code pénal).


Le sacrilège

Est sacrilège toute profanation d’objets, de lieux ou de personnes (religieux, prêtres et consacrés) consacrés à Dieu. Le sacrilège est volontairement commis en haine de Dieu et de la foi. On reconnaît ici le latin sacra, sacré, qui précède legere, c’est-à-dire “cueillir” ou “prendre”, le mot sacrilège désigne initialement le vol d’objets sacrés dans un temple. Accusé de sacrilège et de blasphème, le chevalier de La Barre dans la célèbre affaire La Barre que défendit Voltaire, fut condamné à mort après avoir été torturé de la pire des manières qui soit. C’est lui qui fut le dernier condamné à mort pour sacrilège, en 1766, alors qu’il n’avait que 20 ans, avant d’être réhabilité en 1793. Usage manifeste d’une désacralisation progressive de la religion, l’usage du terme est aujourd’hui souvent dévoyé et tourné en dérision pour qualifier l’irrévérence d’une action. Si le blasphème procède par la parole, le sacrilège procède en actes. 

Tags:
doctrinedogmeÉgliseFoiHérésie
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