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Sauf exception comme le cas des martyrs, l’Église ne reconnaît pas de bienheureux ou de saints sans qu’il y ait un miracle d’ordre physique – les affections psychologiques ou neurologiques ne sont pas retenues – attribué à son intercession. Pour béatifier ou canoniser un baptisé, “on ne se contente pas d’avoir un dossier bien construit, il faut qu’il y ait un signe qui ne dépende pas de nous, qui vienne de Dieu. Une confirmation que la Providence vient nous offrir”, explique le père Bernard Ardura, président émérite du Comité pontifical des sciences historiques, et postulateur de la cause de canonisation de Charles de Foucauld. Dans la longue marche vers la reconnaissance d’un miracle, il faut d’abord trouver un fait qui ne soit pas explicable scientifiquement. Même s’il existe des miracles “techniques” comme “échapper à un danger”, un très grand pourcentage sont des guérisons, glisse le religieux prémontré français.
L’enquête diocésaine
La première partie de la procédure officielle, l’enquête canonique, a lieu dans le diocèse où s’est produit le présumé miracle. L’évêque, contacté par le postulateur, doit constituer un tribunal informatif – composé de l’évêque ou d’un délégué, d’un promoteur de justice, d’un notaire, d’un greffier et d’un médecin – qui recueille toute la documentation. Deux médecins – ou ingénieurs, selon les cas – sont nommés pour examiner indépendamment la personne bénéficiaire du “miracle présumé”. Leur déposition sera ensuite entendue par le tribunal. Il s’agit de constater notamment que la guérison est totale, durable et sans récidive, alors que le pronostic était sans espoir. Des témoins du fait sont également entendus, ainsi que des témoins des prières qui ont été adressés spécifiquement à ce vénérable ou ce bienheureux. L’élément scientifique ne suffit pas en effet. “Les miracles sont une catégorie théologique. Ils ne peuvent se produire que si on les demande”, souligne encore le père Ardura. Lorsque tout le monde a été entendu, le dossier est ensuite envoyé à Rome.
Les étapes romaines
En préambule, le dicastère pour les Causes des saints vérifie toutes les pièces du procès afin de délivrer le décret de validité juridique. Une fois obtenu ce document, le postulateur doit préparer la première partie de la “positio“, une thèse contenant les faits et les témoignages, pour parvenir à prouver qu’il s’agit d’un fait scientifiquement inexplicable qui peut être qualifié de miracle. La partie technique médicale de la positio est soumise pour un premier examen à deux scientifiques indépendants. Si leurs deux avis sont conformes, le dossier passe à la “Consulta medica” : une commission composée de 7 médecins, qui doivent se prononcer sur le cas. “On souhaite l’unanimité mais on admet qu’il puisse y avoir une ou deux voix qui ne partagent pas complètement l’opinion des autres”, précise le père Ardura. Si le fait est reconnu comme “inexplicable”, le volet religieux du dossier, contenant les témoignages de prières, de demande d’intercession, les éventuelles recommandations spirituelles, est confié à 9 consulteurs théologiens. Ceux-ci doivent se prononcer sur la question : s’agit-il d’un miracle de Dieu obtenu par l’intercession du vénérable ou bienheureux ?
Jusqu’au Pape
La positio contenant les résultats de toutes les commissions est soumise aux cardinaux et aux évêques membres du dicastère, qui vont donner leur avis définitif. C’est cet avis qui va être enfin présenté au pape par le préfet du dicastère, actuellement le cardinal Marcello Semeraro. Celui-ci approuve alors la publication d’un décret attestant qu’il s’agit bien d’un miracle, ouvrant la porte à la béatification ou canonisation. Généralement, la démarche diocésaine dure quelques mois, et les étapes romaines peuvent prendre entre deux et quatre ans. Les miracles sont-ils une chose rare ? Si l’Église, prudente, n’en reconnaît que quelques-uns par an au terme de procédures exigeantes, “il s’agit d’une infime minorité par rapport à tout ce qu’il se passe dans le monde”, assure le père Ardura.