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Le cardinal Jean-Claude Hollerich, archevêque de Luxembourg, explique bien selon moi l’un des problèmes auxquels nous sommes confrontés. Dans un entretien au journal La Croix du 23 mai dernier, il observe : “Nous nous sommes habitués à l’Union européenne. Nous ne sommes plus conscients des bienfaits de cette institution politique et de la volonté qui est derrière. Nous avons tendance à oublier que la démocratie est précieuse, et qu’il faut la soutenir.” Or la plupart de nos contemporains vont aller voter pour dire ce qu’ils pensent des enjeux nationaux du moment, qui la plupart du temps, n’ont aucune relation avec des enjeux européens.
Montée des menaces
Prenons du recul sur ce qui se passe dans le monde. Nous assistons à une montée des empires tenus par des pouvoirs de plus en plus forts et menaçants. La Chine veut dominer le monde. Après Hong-Kong, elle s’apprête à juguler la démocratie de Taïwan. La Russie rêve de rétablir les frontières de l’empire russe de Pierre le Grand et n’hésite pas à s’allier pour cela à des pays dangereux, comme l’Iran ou la Corée du Nord. Sa guerre sans limite contre l’Ukraine menace non seulement la démocratie de Kiev, mais également d’autres pays de l’ex-Union soviétique, dont certains font partie de l’Union européenne. L’Ukraine n’est qu’à 1.500 kilomètres de nos frontières. Les États-Unis sont entraînés dans une compétition avec la Chine pour conserver leur place de numéro un mondial. Et nous assistons par ailleurs à une montée d’un islamisme radical qui menace les valeurs humanistes européennes. Dans ce climat de tensions géopolitiques internationales, à l’évidence, la France seule ne signifie pas grand-chose. Seule une Europe unie et forte pourra peser demain pour établir un équilibre international et continuer de promouvoir des valeurs humanistes inspirées d’un héritage chrétien.
Les populismes donnent des explications faciles qui trouvent un écho chez ceux qui craignent de perdre leur identité.
Ne nous illusionnons pas. Ce ne sont pas selon moi les populismes, les nationalismes ou les partis invitant à plus de “souveraineté nationale” qui rendront l’Europe plus capable d’affronter les défis économiques et politiques mondiaux qui sont devant nous et de favoriser la paix. Le Brexit n’est pas un succès. Selon Reuters, de récents sondages d’opinion démontrent que “les Britanniques qui regrettent d’avoir quitté l’Union européenne deviennent progressivement plus nombreux que ceux qui s’en satisfont”. Les populismes donnent des explications faciles qui trouvent un écho chez ceux qui craignent de perdre leur identité. Mais face à une Russie agressive et au terrorisme islamiste, il convient d’être unis et de faire bloc. N’oublions pas l’histoire : les nationalismes ont, dans notre histoire, causé tant de guerres !
Porter un regard critique
Les Semaines sociales de France rappellent avec justesse que “l’Union européenne n’est pas seulement une institution, mais un “bien commun” irremplaçable pour préserver la paix en son sein”. Le site du Parlement européen diffuse une vidéo saisissante qu’il faut regarder d’anciens qui ont traversé les épreuves de l’histoire et rappellent le cadeau qu’est l’Europe pour la paix et la démocratie.Face à la montée des populismes, le cardinal Hollerich appelle à forger de nouveaux idéaux européens. Gardons en mémoire que l’idéal européen est né du christianisme éclairé des fondateurs de l’Union comme Robert Schuman et Alcide De Gasperi. L’Europe est imparfaite, mais son absence ou son affaiblissement seraient terribles. “Cela n’empêche pas de porter un regard critique sur la facilitation de l’avortement ou une certaine conception de la théorie du genre”, rappelle-t-il avec sagesse. Concernant l’immigration, un contrôle est nécessaire. Il est bien sûr impératif d’exiger des migrants une adhésion aux valeurs européennes et de pouvoir en exclure ceux qui les refusent, mais attention à traiter toujours les personnes en reconnaissant leur dignité humaine. En particulier, disons-le clairement, renoncer au droit d’asile est incompatible avec l’Évangile.
Redonner du souffle
L’Europe est en chemin. Saluons déjà ce qu’elle a permis ces dernières années. La coordination européenne lors de la pandémie du Covid-19 a permis d’accélérer les achats de vaccins et de mettre en place un plan de relance massif qui a permis d’éviter la récession de nos économies, de lutter contre l’inflation et de défendre le pouvoir d’achat. Face au dérèglement climatique, l’Europe a été la première à voter un Pacte vert (European Green Deal), qui est un dispositif crédible, certes à améliorer, notamment pour diminuer la bureaucratie administrative, mais qui a le mérite d’exister, favorisant par exemple l’interdiction de certains matériaux polluants dans les poêles ou l’uniformisation des chargeurs de téléphones mobiles. N’oublions pas non plus que la France est le premier bénéficiaire de la politique agricole commune (PAC) avec un apport européen de 9,5 milliards d’euros pour nos agriculteurs. L’Europe a réagi à l’agression russe en Ukraine par une aide financière massive, la protection des réfugiés et a facilité la fourniture d’armements. En matière sociale, l’obligation d’instituer un salaire minimum décent a été votée, allant dans le sens d’une harmonisation des coûts salariaux. Cela n’aurait pas été possible sans concertation entre les pays européens. De même, pour lutter contre la concurrence industrielle chinoise, la France serait fragilisée si l’Union européenne agissait en ordre dispersé.
Le 23 mars dernier, devant les participants à l’assemblée plénière de la Commission des épiscopats européens (Comece), le pape François a invité chacun à lire les signes des temps, afin de redonner du souffle au projet européen. Il s’agit selon lui de “garder les yeux rivés sur les valeurs ayant inspiré le projet européen” et de chercher “une unité qui respecte et valorise les singularités des peuples et des cultures qui la composent”. Soyons convaincus comme lui que l’Europe a un avenir “si elle est vraiment une union et non une réduction de pays avec leurs caractéristiques respectives”.