31.10.2013
Inma Alvarez
L'hebdomadaire italien Panorama révèle, mercredi 30 octobre, que les écoutes téléphoniques effectuées par l’Agence Nationale de Sécurité des Etats-Unis (NSA) auraient aussi visé le Vatican.
« Le soupçon existe que même les conversations du futur souverain pontife puissent avoir été contrôlées. Bergoglio était déjà depuis 2005 l'objet de l'attention des services secrets américains, selon les rapports de Wikileaks », ajoute Panorama. Des accusations que les Etats-Unis ont catégoriquement rejetées mercredi soir.
« Nous n'avons aucune information à ce sujet et de toute façon nous n'avons aucune inquiétude", a réagi le porte-parole du Vatican, le père Federico Lombardi.
Curieux contraste avec la réaction de colère de la chancelière allemande Angela Merkel en apprenant que ses conversations privées avaient été interceptées.
Serait-ce que le Vatican n’est pas conscient de la gravité du scandale ? Bien sûr qu’il en est conscient, surtout après les fuites de la sombre affaire du « Vatileaks », dans laquelle des documents privés ont disparu des bureaux du Pape. Même si, dans ce cas, c’était plutôt la désagréable surprise d’avoir un espion dans la maison, une personne apparemment fidèle agissant dans l’ombre pour des motifs inavouables.
Le “ nettoyage” amorcé par Benoît XVI et poursuivi par son successeur dans les organismes financiers du Saint-Siège conduit à penser que, réellement, s’il y avait une information secrète de type économique révélée par les écoutes téléphoniques américaines, le Pape François aurait été heureux de la connaître…
Dans un autre ordre d’idées, que le Vatican ne soit pas à l’abri des écoutes des services de renseignement, il fallait s’y attendre, compte tenu de l’activité diplomatique intense du Saint-Siège. Nombreux sont les chefs d’Etat qui se rendent au Vatican et nombreuses les questions délicates qui passent par les mains du Pape François comme de ses prédécesseurs.
Mais il est également vrai que la réserve du Vatican est dictée par la prudence et non par les intérêts économiques ou géostratégiques. Le Vatican est un acteur politique de premier plan, mais en tant qu’instance morale qui tempère les relations entre les pays. Il n’a, pour, le dire vulgairement, « rien à gagner ». Peut-être la protection des minorités chrétiennes et des biens de l’Eglise dans les pays en conflit, mais ce n’est pas là un motif inavouable.
Une partie des écoutes téléphoniques, selon les révélations de Panorama, a eu lieu lors de la célébration du Conclave, qui a abouti à l’élection du Pape François. Compte tenu des mesures de sécurité énormes que le Saint-Siège déploie pour garder le secret pendant un Conclave, cette révélation aurait pu susciter une réaction d’inquiétude dans les hautes sphères vaticanes … mais non, il n’en est rien.
L’impénétrable secret qui entoure l’élection d’un Pape est pensé avant tout pour éviter l’entrée, plutôt que la sortie de l’information: autrement dit, ce qui est recherché, c’est empêcher les pressions extérieures sur les cardinaux électeurs, de façon que personne, de l’extérieur, ne puisse conditionner un moment aussi délicat. Le problème le plus épineux, ce ne sont pas les écoutes, mais les interférences.
L’ironie veut que cette affaire des écoutes téléphoniques soit dévoilée précisément avec le Pape le plus “téléphonique” qui ait jamais paru à la Logia vaticane. Il serait très amusant d’écouter les enregistrements du Pape François appelant cette mère célibataire, ou ce dentiste argentin: pour un pape qui a décidé de se faire entendre par les gens de la périphérie, de l’ “extérieur » ”, savoir maintenant que les techniciens des services secrets étaient également « tout ouïe » lui a peut-être fait penser que les voies de la Providence sont vraiment impénétrables pour porter la Bonne Nouvelle du salut aux hommes !