06/05/2014
Il n’est pas nouveau que la Leadership Conference of Women Religious (LCWR) et le Vatican entretiennent des relations pour le moins tendues. Connue pour ses prises de positions controversées et sa désobéissance, accusée de promotion d’hérésie, la LCWR est une association qui regroupe une grande majorité de religieuses américaines.
Le 30 avril dernier, les dirigeants de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi ont rencontré l’association américaine à Rome. A cette occasion, le cardinal Gerhard Ludwig Müller, préfet de la CDF, n’a pas hésité à dénoncer les écarts de la LCWR. Dans un discours aussi diplomate que franc, il dénonce le manque de solidarité de l’organisation avec le Vatican, alors même que cette dernière est placée sous une évaluation doctrinale conduite par un délégué nommé par Rome.
Non sans rappeler les exigences du Vatican face aux débordements de la LCWR, le cardinal a également dénoncé la décision de l’association de donner le prix de leadership exceptionnel à une théologienne fortement critiquée par les évêques des Etats-Unis à cause de la gravité des erreurs doctrinales de ses écrits : « C’est une décision qui passera plutôt comme une provocation à l’endroit du Saint-Siège et de l’évaluation doctrinale. Non seulement cela, mais cette action élargie aussi le fossé entre la LCWR et les évêques », a-t-il déploré.
Le préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a fait part de son étonnement face à ce choix pour le moins provocateur. Mais il a également répondu à une autre polémique, concernant les conclusions de l’évaluation doctrinale, usant de la même franchise : « Laissez-moi répondre à la seconde objection, à savoir que les conclusions de l’évaluation doctrinale ne soient pas étayées. La phrase la plus citée dans l’évaluation doctrinale comme allant trop loin et étant non-étayée est que les religieuses doivent aller au-delà ou dépasser l’Église, voire dépasser Jésus. Oui, c’est un langage dur et je peux imaginer que cela sonne sévère aux oreilles de milliers de religieuses fidèles. Je le regrette, car la dernière chose au monde que la Congrégation voudrait faire serait de questionner le témoignage éloquent, voire prophétique de tant de religieuses fidèles. Mais encore, les problèmes soulevés dans l’évaluation sont si centraux, si fondamentaux qu’ils n’y a pas d’autres moyens de les discuter qu’en ne constituant un mouvement s’éloignant du centre ecclésial de la foi en Jésus-Christ, le Seigneur », a-t-il ainsi déclaré, remettant les choses claires et à leur place.
La LCWR n’en est pas à son premier rappel à l’ordre. Après une enquête en 2012 qui avait duré plusieurs années, l’autorité vaticane avait déjà dénoncé les écarts de l’association. La LCWR, qui prône la liberté de pensée, avait ainsi été fortement réprimandée. Le Vatican avait alors exigé un réalignement majeur sur les enseignements de l’Eglise catholique et lui avait reproché ses prises de position, son peu de solidarité à défendre la doctrine de Rome, notamment sur le respect de la vie et les problématiques sexuelles.
La sœur franciscaine Florence Deacon, présidente de la LCWR, avait alors reconnu de « graves malentendus » entre le Vatican et son organisation lors d’un discours en mai 2013. Embarrassée par une évaluation peu flatteuse de l’organisation par le Saint-Siège, qui avait été approuvée par le Saint-Père, cette dernière s’était expliquée en accusant le manque d’information et de discernement de l’enquête, jusqu’à dénoncer l’implication insuffisante du Saint-Père: « Nous nous interrogeons sur ce qui a vraiment été rapporté au pape nous concernant. Je doute qu’il nous ait suivies de très près quand il était en Argentine. Nous nous interrogeons si on lui en a dit vraiment beaucoup [sur nous] », avait-elle alors déclaré.
Les réactions de ces discours houleux ne se sont pas fait attendre. Pour préparer une réponse au rapport transmis par la CDF, le conseil de la LCWR a récemment annoncé les mesures qu’il a décidé de prendre dans un communiqué. Le 12 juin prochain, la présidente de la LCWR retournera ainsi à Rome pour rencontrer de nouveau le préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. La LCWR a également annoncé que, suite aux discussions à Rome, l’association convoquera ses membres à des réunions régionales puis à son assemblée générale en août, afin de finaliser sa réponse au rapport de la CDF.