Brice Delsouiller est un personnage rare. De ceux qui semblent avoir réussi la prouesse de vivre chaque jour de leur vie selon leur idéal, du moins de ne jamais renoncer à en viser le cap. Quelqu’en soit le prix. Au premier abord, c’est un trentenaire semblable à bien d’autres. Des cheveux bouclés laissés à leur folie, une barbe qui ne compte pas les jours, un beau regard qui passe du vert au gris selon la météo. Il y a près de quinze ans, Brice a choisi de devenir pâtre, et de consacrer désormais la moitié de l’année aux vaches qu’il veille en estive, dans la solitude la plus complète, au cœur d’une nature aussi belle que sauvage : les hautes pâtures pyrénéennes, qui à partir de 1 500 mètres d’altitude viennent tutoyer les sommets.
Le coureur immobile
Puisque Brice aime la liberté, il court, depuis toujours. Et puisqu’il sait quel en est le prix à payer, il se fait souffrir dans des courses de montagne éreintantes où le dénivelé compte bien plus que la distance parcourue. Brice est arrivé dans ces compétitions de l’extrême par hasard. Et sans entraînement. Du moins, sans aucun entraînement de type moderne, lui qui préfère les longues courses en dehors des sentiers battus pour arpenter les combes et les crêts, découvrant à chaque enjambée une nature qui ne l’a jamais rassasié. Cet amateur qui quitte ses alpages ou la ferme familiale une dizaine de fois par an pour enfiler les dossards des compétitions les plus ardues, s’est fait une place au sommet. Mais si Brice court beaucoup, il aime aussi l’immobilité de sa cabane. S’il est capable d’être très rapide, il ne comprend rien à la civilisation de la vitesse. Philosophe, il ne se grise pas de ces succès sur les podiums mais est aujourd’hui fier de pouvoir ainsi faire connaître la vie qu’il a choisie.
45 minutes de grâce et de sagesse
Talentueuse documentariste, Sandrine Mörch est tombée amoureuse des Pyrénées et de ses hommes il y a longtemps. En un peu moins d’une heure, elle nous permet de nous faufiler dans la vie solitaire de notre pâtre philosophe. Écouter Brice Delsouiller — qui ignore le bavardage — c’est entendre Giono ou Thibon. Mieux encore : il faut le voir contempler les vallées du haut d’un piton, caresser la croupe d’une de ses vaches, ou plonger dans les eaux glacées d’un torrent de montagne. Dans la vie de Brice se mêlent une simplicité qui va de soi, un vif sens du tragique et un puissant amour. Et cette destinée solitaire, exigeante et assumée ne peut qu’appeler les citadins que nous sommes — et que nous demeurons souvent même en campagne — à nous retirer quelques temps du tourbillon moderne. Brice parle peu, il sait le prix du silence et de la solitude, mais sa vie nous susurre amicalement : « Fais un pas de côté, après les premiers efforts se cache la vraie joie ».
Brice, un vacher à l’assaut des Pyrénées, par Sandrine Mörch, Arte Geo 360°. En replay jusqu’au 27 février.
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