Être confronté à la perte d’un conjoint ou d’une conjointe, c’est un moment particulièrement difficile de l’existence, car il faut trouver en soi la force de surmonter la douleur et de vivre malgré l’absence. Comment surmonter un tel traumatisme ?
Du déni à l’acceptation du veuvage
Pour le docteur Hervé Mignot, spécialisé dans les soins palliatifs, même si le deuil est une expérience propre à chacun, on repère certaines étapes qui adviennent très souvent, suite au choc lié à l’annonce du décès. Comme il l’écrit dans un article intitulé “Qu’est-ce que le deuil ?”* : “Il y a d’abord une phase de déni durant laquelle la personne se dit “Je ne peux pas y croire” ; il s’agit d’une difficulté à admettre la perte qui peut durer plusieurs semaines, et qui est souvent accompagnée d’une grande anxiété. Puis survient la colère (…) contre le médecin, le responsable d’un accident, contre soi-même parfois, ou celui qui est parti”. Enfin vient une phase de “marchandage”, lorsque la personne tente de limiter sa peine, en partant en voyage, en se remettant en ménage ou bien en s’investissant dans le travail.
Si perdre son époux ou son épouse conduit presque nécessairement à une phase de dépression, qu’il s’agisse d’un décès accidentel ou pressenti au travers d’une longue maladie par exemple, il s’agit pourtant d’un prélude à la sortie du deuil. La douleur se transforme petit à petit en une présence intérieure : “Tu n’es plus là où tu étais, mais tu es partout là où je suis”, écrivait Victor Hugo.
Le veuvage est une expérience intime et parvenir à vivre autrement, sans oublier l’être aimé, demeure l’affaire de chacun. D’ailleurs, pour certaines personnes, l’expression “faire son deuil” est dénuée de sens, car on n’oublie jamais vraiment cet être cher. Alors, comment continuer à vivre sans culpabilité, tout en conservant le souvenir du défunt ?
Résilience : “la vie plus forte que tout”
Après un long travail sur soi, la douleur liée à l’absence se transforme en une lumière intérieure, qui nous accompagne dans la vie. Pour Sophie Le Chatelier, qui organise des rencontres pour veufs & veuves à la paroisse du Chesnay-Rocquencourt, même le mot “veuvage” est difficile à porter car il signifie “vide” : “Celui-ci ne doit pas être comme un boulet au pied que l’on traîne, il faut parvenir à embrasser notre douleur, à la prendre dans nos bras, pour ne pas la subir”. Devenue veuve à l’âge de 40 ans, elle invite chacun au dialogue, à cultiver la confiance et l’espérance, pour avancer dans la vie et percevoir les autres joies que celle-ci procure, comme lorsque l’on est entouré de ses petits enfants par exemple : “la vie est plus forte que tout”.
“Suite à la mort de mon mari, j’ai dit à mes enfants qu’ils ne doivent pas hésiter à prier avec et pour leur père. C’est une chance de pouvoir ressentir cette présence et le veuvage est souvent plus difficile à vivre pour les personnes qui ne ressentent pas cela”, nous explique Sophie. On n’oublie donc jamais vraiment son conjoint ou sa conjointe, et l’expression “refaire sa vie” est encore une fois trompeuse, car on vit finalement autrement, porté par la présence qualitativement différente de l’être aimé.
Lors des rencontres qu’elle organise depuis maintenant 4 ans à la paroisse, les personnes qui viennent prier et échanger repartent souvent plus légères : “Le but est de pouvoir dialoguer, car il s’agit souvent de personnes âgées qui souffrent de la solitude. Durant la première heure dédiée à la discussion, chacun parle de son expérience, l’objectif étant de réapprendre à vivre ; puis la deuxième heure est consacrée à la prière, où chacun peut se retrouver en communion avec son conjoint. Lors des litanies, nous ne lisons pas des textes bibliques nécessairement liés à la mort, nous avons par exemple lu le texte du Bon Pasteur, car le message d’espérance est essentiel. Il existe de nombreuses figures du veuvage dans la Bible dont Anne, fille de Phanuel, citée en Luc 2, 36-38, qui suite au décès de son mari s’est tournée vers l’amour de Dieu. Il faut donc continuer à cultiver l’amour et le partage”.
Accompagnement et soutien aux veuves et aux veufs
Suite à la perte d’un époux ou d’une épouse, les tâches quotidiennes peuvent devenir difficile à exécuter. Il faut penser au repas de funérailles, effectuer les démarches aux pompes funèbres, s’occuper des papiers, travailler et faire garder les enfants s’ils sont jeunes. L’aide des proches est très précieuse dans de telsmoments mais lorsque l’on n’a pas cette chance, il existe de nombreux organismes d’aides aux personnes concernées. Certains sont civils, comme la F.A.V.E.C ou religieux, comme le mouvement chrétien Espérance et Vie, et permettent d’apporter un soutien à la fois psychologique et administratif.
Au niveau national, le mouvement chrétien Espérance et Vie organise tous les 5 ans un pèlerinage à Lourdes pour veuves et veufs, qui a lieu sur trois jours. Différents aspects du veuvage peuvent être abordés au cours de rencontres et de conférences menées par des intervenants spécialistes du deuil, permettant d’évoluer dans son propre cheminement spirituel, vers une vie plus sereine.
* Pour lire l’article en entier du docteur Hervé Mignot sur le deuil, voici le lien pour le télécharger directement. A noter que le docteur Mignot est intervenu en avril 2016 au rassemblement national à Lourdes, Espérances et Vie qui accompagne les premières années de veuvage.