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Bonnet sur la tête, vêtu d’un jean, un homme avec son portable, prend une photo du Christ en train de porter sa croix. Une jeune femme, vélo à la main, assiste à la mort du crucifié. Voilà quelques-uns des protagonistes de ce nouveau Chemin de croix qui va être installé dans la paroisse de Saint-Nizier, au coeur de la presqu’île lyonnaise, le 21 septembre prochain.
Une paroisse qui n’avait plus de Chemin de croix depuis quelques années, mais un peintre parmi ses paroissiens ! Âgé aujourd’hui de 40 ans et père de trois enfants, Bruno Desroche accompagne son épouse japonaise qui se fait baptiser à Saint-Nizier en 2011. Il s’investit ensuite dans la paroisse notamment comme guide pour les touristes qui passent, nombreux, dans cette église lyonnaise chargée d’histoire. Parallèlement professeur de dessin et passionné d’histoire de l’art, il décide d’offrir à son curé deux tableaux, issus d’un projet qu’il mène avec ses étudiants. “Le père Hugues ne savait pas très bien quoi penser de ces toiles, qui cassent un peu les codes de l’art contemporain alors qu’elles reprennent une démarche classique, celle de la représentation figurative”, s’amuse le peintre. En effet, quoi de plus classique, dans la longue histoire de l’art sacré, que de peindre des scènes bibliques dans la temporalité de l’artiste. Impossible de les citer tous d’ailleurs ces artistes, peut-être seulement Pieter Bruegel dont Bruno Desroche est un grand admirateur.
Une mise en scène physique
C’est d’ailleurs une démarche artistique que le peintre lyonnais présente à ses élèves trois ans plus tôt en les faisant participer à ce projet dont il a l’intuition. Pendant une année, ils vont travailler ensemble sur la mise en scène d’un Chemin de croix “contemporain”. La lumière, les vêtements, les poses, ils ne laissent rien au hasard. Puis, par trois fois, ils vont se retrouver dans un hangar le samedi matin, pour jouer physiquement ce chemin de croix sous l’œil aiguisé du professeur et d’un photographe. “La croix faisait 70kg, l’étudiant qui jouait le Christ, et qui s’appelle Élie, a bien senti tout son poids !”, raconte Bruno Desroche qui a voulu une véritable mise en situation.
“Aucun de nous n’est sorti indemne de ces séances, cela nous a tous bousculés, croyants ou pas”. Puis, à partir des photos réalisées, le peintre va s’enfermer plusieurs mois pour bâtir son œuvre, quinze toiles à la peinture à l’huile, sur des panneaux en bois traités à l’ancienne. “Travailler sur la Passion, c’est passer une brosse de fer sur son âme”, avoue l’artiste qui y a laissé des larmes “de repentir et de reconnaissance”.
Les paroissiens se mobilisent
Si, dans un premier temps, les deux toiles offertes par Bruno Desroche ont laissé le curé dubitatif, ce n’est pas le cas de quelques paroissiens qui se laissent happer par cette mise en scène contemporaine y trouvant une forte résonance spirituelle. Alors ces paroissiens se mobilisent. Le voilà le nouveau Chemin de croix qu’il faut pour l’église ! À l’occasion du Carême 2019, ils créent un site internet dédié et une cagnotte en ligne pour en financer l’achat. Un projet qui va toucher au-delà de la paroisse au vu des nombreux dons reçus de lyonnais, pratiquants ou pas.
Et en ce mois de septembre, c’est l’aboutissement d’une démarche paroissiale et artistique avec l’installation de ces quinze tableaux sur les piliers de l’église Saint-Nizier. Quinze toiles pour un Chemin de croix ? “La dernière œuvre, c’est la Résurrection”, explique le peintre. “L’église Saint-Nizier accueille des milliers de visiteurs chaque année, or beaucoup d’entre eux ne connaissent pas ou plus la fin de l’histoire ! Il fallait donc leur offrir le sens ultime et profond de cette humiliation vécue par le Christ avec une image forte, celle des gardes terrassés, mis à terre par la puissance divine”. À n’en pas douter, ces toiles sont prêtes à toucher les cœurs et les âmes des curieux. Même look et portable à la main, en feront-ils des selfies ?