Un nouveau-né vit l’accouchement comme une séparation d’avec sa mère, avec ce « nid d’amour » qui l’a abrité pendant neuf mois. Cette séparation se fait plus ou moins sereinement selon les conditions de la naissance : césarienne d’urgence ou programmée, accouchement stressant, violent ou très rapide… Des conditions qui peuvent faire émerger des angoisses liées à cette première séparation, ayant des répercussions après la naissance : sommeil perturbé, comportement agité, blocages en tout genre, alimentation difficile… Mais la bonne nouvelle, selon les spécialistes de l’angoisse de séparation, c’est que les parents peuvent agir de manière « préventive » ou même réparer, avec de simples mots, une naissance traumatisante. « Il est aussi merveilleux qu’incroyable de voir la force des paroles réparatrices sur les bébés, les enfants et les adolescents », soulignent Véronique Lemoine Cordier et Agnès Daubricourt, auteurs d’un petit guide pour construire la sécurité affective des bébés intitulé Je rassure mon tout-petit (Quasar).
Véronique Lemoine Cordier, psychothérapeute depuis une vingtaine d’années, a fait l’expérience qu’il est possible de traiter une blessure affective par une parole réparatrice. Elle donne de nombreux exemples démontrant combien des paroles peuvent être libératrices, même des années après un événement. Il ne s’agit pas de faire culpabiliser les parents qui auraient « mal fait » à un moment donné, mais de donner des clés pour soulager un enfant, en relisant la grossesse, la naissance, ou encore les premières années de sa vie. « Malgré toute notre bonne volonté, nous subissons presque systématiquement des contextes fragilisants. Notre rôle de parents consiste uniquement à aider nos enfants en faisant de notre mieux et, dans la mesure du possible, à leur éviter de souffrir ou à les accompagner au mieux dans cette souffrance parfois inéluctable », précise-t-elle. Voici quelques paroles réparatrices, dans des cas d’accouchements qui ne se passent pas exactement comme on l’aurait souhaité.
Accouchement violent
La souffrance physique de la mère ou de l’enfant nécessite parfois qu’on utilise les forceps, la ventouse ou même les mains pour aller chercher le nouveau-né. Dans ce cas-là, il est important de rassurer son bébé, pendant l’accouchement et même après, en disant :
“Ce que tu ressens/ as ressenti doit/ devait être très douloureux mais je peux t’assurer que c’est/ c’était le seul moyen pour que tout se termine bien pour toi et pour moi. Tu ne le méritais pas, c’est fini. Souffrir n’est pas mourir”.
Accouchement rapide
Il arrive que le travail ne dure pas et que l’accouchement soit un peu précipité. Une naissance déstabilisante pour l’enfant dans la mesure où la séparation se fait avec une trop grande rapidité. Il convient alors, après la naissance, de relire l’événement avec son enfant :
« Quand tu es sorti, ça a été très rapide, ça s’est fait tout d’un coup, sans que tu sois vraiment préparé. Tu as découvert le bruit, la lumière, le froid, la respiration, le contact physique… Et quand on est un petit bébé et que tout change brutalement, on peut se sentir perdu comme si on croyait qu’on allait mourir. Tout cela est complètement fini, ça ne recommencera plus jamais et même si ça a été très désagréable, ça n’a pas été dangereux.”
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Séparation après la naissance
Lorsqu’un nouveau-né est séparé de sa mère juste après l’accouchement pour une opération, une détresse respiratoire, une réanimation…, cela laisse un grand sentiment de tristesse chez la maman mais aussi chez le bébé qui peut se sentir abandonné. Mais on peut le réconforter, en amont ou après, par ces mots :
« On va se voir/s’est vu un tout petit peu, puis tu vas devoir/ as dû partir tout seul avec des gens qui sont/ étaient là pour que tu ailles bien. Peut-être que ces personnes vont te faire/ t’ont fait des misères, ce sont/ c’étaient des misères que tu ne mérites/ méritaient pas mais qui sont/ étaient nécessaires pour ta santé. Même si on ne pourra pas se voir/ ne s’est pas vu durant quelques heures, je continuerai/ continuais à t’aimer, on se retrouvera/ s’est retrouvé plus tard et tu peux être certain que tu es/ étais en sécurité ».
Césarienne programmée
Lors d’une césarienne, un nouveau-né peut ressentir de manière violente le fait d’être exposé brutalement au bruit, au froid, à la lumière et à la nécessité de devoir respirer, sans avoir été préparé par tout le travail habituel de l’accouchement. On peut alors lui expliquer :
« Tu ne vas pas prendre/ n’as pas pris le chemin qui t’est/ était réservé pour naître, on va venir/ est venu te chercher directement et ça, tu n’y peux/ pouvais rien. Ce sont les médecins qui vont venir/ sont venus te chercher directement et ça va être/ a été très désagréable pour toi parce que tout d’un coup tu vas voir/ as vu beaucoup de lumière, entendre/entendu beaucoup de bruit, avoir/ eu froid, devoir/ dû respirer… Même si c’est/ c’était très désagréable, c’est/ c’était pour permettre à ta vie de continuer”.
Césarienne en urgence
A cause du risque vital engagé chez l’enfant ou chez la mère, les césariennes pratiquées en urgence pâtissent d’un climat d’angoisse dont on peut reparler au bébé pour en atténuer les conséquences néfastes. En effet, le bébé peut être amené à croire que se séparer serait dangereux puisqu’on peut mourir. Les séparations ultérieures peuvent le lui rappeler. Dès que possible, on peut le rassurer de cette manière :
« Quand les médecins ont découvert que ton cœur n’allait pas bien, ils ont décidé de venir te chercher directement dans mon ventre pour permettre à ta vie de continuer. Tu nous as senti très inquiets et toi, en souffrant, tu as peut-être cru que c’était comme si tu allais mourir. C’est fini, ça ne recommencera plus jamais et même si c’est vrai que ça aurait pu être dangereux, tout s’est très bien terminé ».
Si les mots revêtent un pouvoir libérateur certain, ils ne sont pas les seuls. Prier, invoquer la bienveillance du Seigneur, confier ses souffrances et son nouveau-né à Dieu sont également une immense source d’espérance pour les chrétiens.
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