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Éthiopie : « La situation est devenue trop dangereuse » déplore un missionnaire

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EDUARDO SOTERAS / AFP

Région du Tigré, au nord de l’Éthiopie. Décembre 2020.

Filipe Avillez - AED - publié le 10/11/21

Missionnaire en Éthiopie, un prêtre catholique a accepté de livrer, sous couvert d'anonymat pour des raisons de sécurité, son témoignage sur la situation du pays, le climat ambiant et l'incertitude grandissante dans laquelle chacun est contraint de vivre.

« Nous avons vu beaucoup de souffrance. De nombreuses personnes ont été tuées et d’autres ont dû fuir et ont eu besoin de nourriture, d’eau, de médicaments et d’hébergement. » C’est un témoignage inédit que celui de ce prêtre catholique, missionnaire en Éthiopie, a accepté de livrer sous couvert d’anonymat. Alors que le conflit entre les forces gouvernementales et les forces loyales au Front de libération du peuple tigréen s’intensifie, il raconte son quotidien et livre son analyse d’une situation chaotique.

Il vaut mieux allumer une bougie que de maudire l’obscurité.

Jusqu’à la fin du mois d’octobre, il était basé à Kombolcha, une ville située à la périphérie de la région Amhara, proche du Tigre, et à environ 380 kilomètres au nord de la capitale Addis-Abeba qui fut envahie par des milliers de personnes fuyant la zone de conflit, et encore plus dans les villes voisines comme Dessie. Au fil des jours, les premières inquiétudes sur la manière de fournir de la nourriture et de l’aide humanitaire aux personnes déplacées à l’intérieur du pays, ont laissé place à la crainte des combats, qui ne cessent de se rapprocher.  « Notre petite ville de Kombolcha comptait plus de 4.000 personnes déplacées. Nous avons fait ce que nous pouvions pour rassembler de la nourriture, des couvertures et de l’eau, mais ce n’était qu’une goutte dans l’océan des besoins. Mais comme on dit, il vaut mieux allumer une bougie que de maudire l’obscurité. »

« Ceux qui avaient des parents dans la capitale leur ont envoyé leurs enfants et leurs femmes. Nous avons également envoyé certains de nos séminaristes à Addis Abeba, mais nous, les prêtres, sommes restés pour être avec les personnes qui ont fui, pour voir comment les choses évoluent. »

À la fin du mois, cependant, la situation s’est aggravée à mesure que les combats se rapprochaient, les forces tigréennes repoussèrent une offensive du gouvernement et prirent les villes de Dessie et Kombolcha. C’est à ce moment-là que les missionnaires furent contraints de partir. « La situation est devenue trop dangereuse. Maintenant, nous sommes obligés de fuir », écrit le prêtre de Kombolcha le soir avant que la ville ne soit envahie. « J’ai déjà envoyé d’autres pères, maintenant je reste seul avec les gardiens. Je vais voir si je peux aussi m’enfuir demain ».

Les autres réfugiés ont réussi à s’échapper de Kombolcha avant l’arrivée des forces tigréennes et ont parcouru 50 km vers le sud, en direction d’Addis-Abeba, avant de devoir s’arrêter car la route était bloquée. Mais le prêtre missionnaire a pu informer ACN qu’ils sont en sécurité. « Je suis hors de danger. Les routes sont pleines de gens », explique-t-il dans un message daté du 1er novembre.

Un conflit qui a démarré il y a un an

Les combats entre les soldats du gouvernement majoritairement amhara et les forces tigréennes ont commencé il y a un an, le 4 novembre 2020, puis rapidement, les militaires érythréens se sont impliqués également. Les raisons de cette guerre sont complexes, mais les résultats, comme toujours, ont été particulièrement tragiques pour la population civile.
Le riche patrimoine chrétien de l’Éthiopie est également menacé. Les villes de Lalibela – connue pour ses églises taillées dans la roche – et d’Axum – ancienne capitale de l’empire éthiopien et, selon la tradition locale, lieu de repos actuel de l’Arche d’Alliance – ont été touchées par les combats.

La récente prestation de serment du Premier ministre Abyi Ahmed pour un second mandat de cinq ans a suscité un certain espoir de paix, mais celui-ci a été de courte durée. Des pancartes portant une fleur et les mots « Nouveau départ » ont été vues dans toute la capitale Addis-Abeba avant la cérémonie de prestation de serment. Après celle-ci, nous espérions que la guerre prendrait fin, mais nous avons été surpris de constater qu’elle se poursuivait et se rapprochait de nous à Kombolcha. »

Nous demandons humblement vos prières pour la paix et la sécurité dans notre région, ainsi que d’autres formes de soutien.

À cause du conflit en Éthiopie de nombreuses régions difficiles sont devenues inaccessibles aux journalistes et aux agences humanitaires. Face à la tension croissante, les missionnaires catholiques savent que l’aide matérielle est difficile à trouver et demandent surtout des prières. « Nous demandons humblement vos prières pour la paix et la sécurité dans notre région, ainsi que d’autres formes de soutien », déclare le prêtre.

L’Éthiopie est divisée à peu près en deux entre chrétiens et musulmans, le passé glorieux du pays est inextricablement lié à la foi chrétienne, ce qui en fait le plus ancien pays chrétien indépendant au monde. La plupart des chrétiens appartiennent à l’Église orthodoxe éthiopienne Tewahedo d’avant Chalcédoine, qui est en communion avec d’autres Églises orientales telles que les Églises copte et arménienne. Il existe une petite mais dynamique communauté catholique, divisée entre le rite latin et le rite éthiopien Ge’ez.

Tags:
éthiopieGuerreTigré
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