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Loi de bioéthique, proposition de loi allongeant le délai pour pratiquer une IVG, pression pour la légalisation de l’euthanasie… Avec la fin du quinquennat et la campagne présidentielle qui s’annonce, les sujets touchant au cœur de l’homme et de sa dignité ne manquent pas. Mais s’ils sont nombreux, ils peinent à mobiliser l’intérêt des citoyens, plongés dans leur quotidien. “Bien qu’apparemment éloignée des sujets concrets comme le pouvoir d’achat, la manière d’envisager la dignité humaine se répercute sur la façon d’organiser la société, le système de santé, et même les relations économiques”, confie à Aleteia Éric Chouteau, directeur général d’Alliance VITA, une association qui se mobilise en faveur de la dignité humaine et qui vient en aide aux personnes fragilisées par les épreuves de la vie. “On pense souvent que nous avons d’abord besoin d’un moteur, d’une espérance pour nous mettre en mouvement et agir pour préserver la dignité de l’homme. Mais c’est l’inverse : c’est notre action qui est source d’espérance.”
Aleteia : Vote de la loi bioéthique, allongement du délai pour avorter… La dignité humaine se gomme-t-elle progressivement de notre société ces derniers mois ?
Éric Chouteau : La dignité humaine c’est ce qui n’a pas de prix car nous pensons que toute vie humaine a une valeur en soi. Concernant la loi de bioéthique, derrière l’arbre de l’élargissement de la PMA à toutes les femmes, il y a toute une forêt de lignes fondamentales qui sont bouleversées. Je pense par exemple à l’autorisation de créer des embryons chimères qui brise la frontière homme – animal. Et puis il y a toutes ces mesures concernant la recherche sur l’embryon qui le chosifient de plus en plus alors que la qualité d’une civilisation se mesure à son souci de protéger les plus fragiles, les plus faibles…
C’est une illusion de croire que toutes les femmes avortent librement et par véritable choix.
Il y a aussi la proposition de loi visant à allonger le délai pour pratiquer une IVG de 12 à 14 semaines…
Le vote de l’allongement du délai par l’Assemblée nationale est une nouvelle négation de la dignité de toute vie humaine dès son commencement. Avant d’enclencher le processus législatif où l’on voit beaucoup de considérations d’ordre politique, il faut revenir à la réalité. 3.000 à 5.000 femmes partiraient à l’étranger pour des raisons de délai. Ce chiffre invoqué par les promoteurs de cet allongement ne repose en fait sur aucune donnée fiable. En outre, deux semaines de plus, cela peut aussi être, pour beaucoup de femmes, deux semaines de pression en plus. La grossesse ne peut pas s’installer. Cet allongement du délai ne peut pas être analysé sans prendre en compte la réalité de ce que vivent les femmes. C’est une illusion de croire que toutes les femmes avortent librement et par véritable choix. Nous avons néanmoins une raison de nous réjouir puisque la clause de conscience spécifique à l’avortement, garante d’une liberté fondamentale des soignants, a finalement été réintroduite.
La recherche des intérêts individuels est-elle la cause de tout cela ?
Il y a sûrement beaucoup de facteurs. Mais la culture ambiante pousse à l’individualisation et à l’envie de tout maîtriser. Cette volonté de toute puissance était déjà inscrite dans le mythe prométhéen mais elle se trouve exacerbée par les moyens techniques mis à disposition des hommes dans le domaine de la communication, de l’informatique, des biotechnologies… Le mythe prométhéen est ancien, certes, mais il est magnifié par toutes les ouvertures techniques possibles aujourd’hui. La société est obnubilée par la recherche de performance. Les limites des techniques appliquées à l’humain sont sans cesse repoussées : maîtrise de la fécondité, de la maladie, de son corps biologique, de sa sexualité et finalement de sa mort. Nous avons aujourd’hui la main sur des techniques et des outils à disposition immédiate et la réflexion passe au second plan, après le rouleau compresseur de la technique. Le paradoxe, c’est que si le principe de précaution environnemental est reconnu, le principe de responsabilité en matière bioéthique est, quant à lui, rejeté.
Nous sommes dans une société du visible qui ne prend en compte les choses que lorsqu’elles sont devenues apparentes. L’embryon n’est pas visible, la personne âgée en fin de vie au fond de sa chambre d’Ehpad non plus.
N’y a-t-il pas une contradiction entre le souci de l’inclusion et en même temps le refus de la fragilité ?
Je pense que derrière ces mots il y a la question de ce qui est visible et de ce qui ne l’est pas. L’accueil de la différence est essentiel pour construire la fraternité. La bioéthique est la pierre fondatrice de cette société de l’inclusion car elle inclut les plus petits, les plus fragiles, y compris l’embryon qui est déjà une vie humaine. Mais nous sommes dans une société du visible qui ne prend en compte les choses que lorsqu’elles sont devenues apparentes. L’embryon n’est pas visible, la personne âgée en fin de vie au fond de sa chambre d’Ehpad non plus. Il y a dans cette exclusion de toutes les situations fragiles, de solides menaces eugénistes. L’inclusion, la vraie inclusion, se souvient que “l’essentiel est invisible aux yeux”..
À quelques mois de l’élection présidentielle, que faire pour que cette fragilité occupe le devant de la scène politique ?
Alliance VITA va organiser en janvier son université de la vie autour de quatre soirées de formation bioéthique. Cette année, nous avons choisi le thème de “la liberté, pour quoi faire ?”, pour aider les participants à s’orienter au milieu des grands débats de la société. En janvier également nous allons lancer une vaste campagne de sensibilisation afin d’interroger le regard que nous portons sur les personnes vulnérables. Plus globalement je pense qu’il est urgent et essentiel de retrouver le sens de l’émerveillement devant l’humain, devant la beauté de la vie humaine dès qu’on prend le temps de la laisser s’épanouir. On pense trop souvent que nous avons d’abord besoin d’un moteur, d’une espérance pour nous mettre en mouvement et agir pour préserver la dignité de l’homme. Mais c’est l’inverse : c’est en agissant concrètement, à notre niveau, que nous trouverons l’espérance.
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