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Le pèlerinage pénitentiel du pape François au Canada

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Photo by ARIS MESSINIS / AFP

Jacques Gauthier - publié le 22/07/22

Le pape François vient au Canada du 24 au 29 juillet en humble pèlerin de la paix, écouter, dialoguer et prier avec les peuples autochtones marqués par la tragédie des pensionnats.

À la foule rassemblée sur la place Saint-Pierre pour l’angélus du dimanche 17 juillet, le pape François a parlé de son voyage historique au Canada, du 24 au 29 juillet, comme d’un « pèlerinage pénitentiel ». Il a demandé aux fidèles de prier pour lui. Il en aura besoin, car le Comité organisateur n’a eu que deux mois pour préparer ce voyage. Sans parler du fait que nous sommes en pleine vague de Covid-19 et que la santé du pape sud-américain demeure chancelante avec l’âge. Il a dû annuler deux visites pastorales au Liban et en Afrique, sur les conseils du médecin, à cause des douleurs au genou qui réduisent sa mobilité.

François reste tout de même déterminé quand il s’agit d’aller « vers les périphéries », à la rencontre des plus souffrants. Il vient au Canada en humble pèlerin de la paix, écouter, dialoguer et prier avec les peuples autochtones marqués par la tragédie des pensionnats. L’Église canadienne, et surtout celle du Québec, a bien besoin de ce coup de pouce du pape pour avancer sur le long chemin de guérison et de réconciliation, d’où le thème de sa visite : Marcher ensemble. Je crois qu’il saura toucher les cœurs par son authenticité, sa simplicité et son humanité.

Le drame des pensionnats

À l’issue de la prière de l’angélus, le chef de l’Église déclara : « Malheureusement, au Canada, de nombreux chrétiens, y compris certains membres d’instituts religieux, ont contribué à des politiques d’assimilation culturelle qui, dans le passé, ont gravement porté préjudice aux communautés autochtones de diverses manières ». En mars 2022, il avait rencontré des communautés autochtones au Vatican, avant de présenter des excuses publiques le 1er avril : « Je demande pardon à Dieu et je voudrais vous dire, de tout mon cœur: je suis très affligé. Et je me joins à mes frères évêques canadiens pour vous présenter des excuses. » Il avait laissé entendre qu’il souhaitait venir cet été présenter des excuses en personne sur leur territoire. 

La visite historique de François sera l’occasion pour les catholiques du monde entier d’entendre parler des Autochtones du Canada, de compatir avec les victimes d’abus spirituels et sexuels. Elle fait partie des recommandations du rapport de la Commission d’enquête Vérité et Réconciliation, remis en 2015. Ce fut long, mais nous y sommes.

Un système mis en place dans les années 1870

Rappelons que le système des pensionnats pour autochtones a été mis en place par le gouvernement fédéral du Canada dans les années 1870 jusqu’en 1995. Cette puissante machine colonialiste avait pour but de « tuer l’Indien dans l’enfant ». Pour y arriver, on laissa la gérance aux différentes églises, surtout catholique et anglicane, oubliant que c’est le Christ aussi qu’on agressait en eux : « Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait » (Mt 25, 40). Il y a eu près de 150.000 enfants autochtones qui ont été retirés de leurs familles et envoyés dans des écoles pour les « civiliser ». Entre 3.000 et 6.000 enfants sont morts entre les murs des 130 pensionnats, qui se trouvaient surtout dans l’Ouest canadien. On en comptait une douzaine au Québec.

En mai 2021, la découverte des restes de 215 enfants, enterrés sur le site d’un pensionnat à Kamloops, en Colombie-Britannique, a rouvert les plaies. En réaction, des églises furent incendiées et des lieux de culte attaqués. Les chefs des Premières Nations ont appelé au calme, rappelant qu’on ne règle rien par la vengeance et la violence. Il y a eu des excuses publiques de Justin Trudeau, puis des évêques canadiens. C’est dans ce contexte que s’organisèrent le voyage des autochtones à Rome et la visite du pape François au Canada. 

Tolérance zéro pour les abus

Le « pèlerinage pénitentiel » de François débutera à Edmonton, sur les rives du lac Sainte-Anne, un haut lieu de prière pour les Autochtones. Il y aura plusieurs rencontres avec eux. Le 26 juillet, il célébrera la messe des grands-parents de Jésus, Anne et Joachim, dans le stade d’Edmonton. Deux jours plus tard, il s’envolera pour Québec, où il célébrera l’Eucharistie en compagnie de milliers d’autochtones au sanctuaire Sainte-Anne-de-Beaupré. Le soir, il présidera les Vêpres à la cathédrale de Québec. Il terminera son voyage à Iqaluit dans le territoire du Nunavut. 

Avec le ton libre qu’on lui connaît, il reviendra sans doute sur les thèmes qui lui sont chers, et que nous retrouvons dans l’exhortation apostolique sur l’Amazonie : justice et pardon, dialogue et liberté, écologie intégrale et contemplation, épanouissement des cultures et annonce du Christ. Il écrit au no 7 : « Je rêve d’une Amazonie qui lutte pour les droits des plus pauvres, des peuples autochtones, des derniers, où leur voix soit écoutée et leur dignité soit promue ».

Que sainte Kateri Tekakwitha accompagne le Saint-Père tout au long de son pèlerinage pénitentiel.

Il condamnera sûrement les abus commis par les membres du clergé et de communautés religieuses, comme il l’a fait à des religieux, à la fin de l’audience du 14 juillet 2022 : « Tolérance zéro pour les abus sur mineurs ou sur les personnes vulnérables […] S’il vous plait, ne cachez pas cette réalité. Nous sommes religieux, nous sommes prêtres pour amener les gens à Jésus, pas pour les « manger » avec notre concupiscence. » Il parlera peut-être d’une juste compensation à accorder aux victimes et des moyens à mettre en place pour que les abus cessent. On verra.

Je termine sur un souvenir personnel : la conférence que j’ai donnée à l’église Notre-Dame-de Lorette dans le village des Hurons de Wendake le 15 octobre 2012 sur Kateri Tekakwitha. Il fallait voir la fierté et la joie des Autochtones présents. Kateri, leur sœur de sang, allait être reconnue modèle de sainteté dans le monde entier. Ce signe de rapprochement entre l’Église catholique et les Premières Nations était prophétique. Il arrivait par la spiritualité et le sacré, par l’union entre foi et culture, comme le mentionnait Benoît XVI dans l’homélie de la canonisation de Kateri: « En elle, foi et culture s’enrichissent ».

Que sainte Kateri Tekakwitha accompagne le Saint-Père tout au long de son pèlerinage pénitentiel. Qu’elle ravive l’espérance de ses frères et sœurs autochtones sur le chemin de la justice et du pardon.

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Tags:
CanadaPape FrançoisPèlerinage
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