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Un été de feu

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Shutterstock I evasion228

Incendie dans le maquis sur la route entre Aubais et Gallargues-le-Montueux (Gard), 31 juillet 2022.

Xavier Patier - publié le 30/08/22

"Matin, midi et soir, la radio nous assénait que le réchauffement climatique était inéluctable et causé par nos péchés." L’écrivain Xavier Patier médite sur les images de nos forêts en flamme durant cet été caniculaire : la pluie va-t-elle revenir ?

Comme disait l’importun Floche dans Le commissaire est bon enfant de Courteline, « la Nature — qui seule et toujours a raison — exige que l’homme ait chaud l’été comme elle demande qu’il ait froid l’hiver » ! Floche en déduisait qu’il convenait de n’allumer de feu que pendant les grandes chaleurs. Le commissaire le tenait pour fou. Mais Floche était-il fou ? La Nature maltraitée semble s’être donnée depuis deux mois un malin plaisir à nous rappeler que l’été est une saison cruelle. On peut se protéger du froid. Contre la canicule, nulle protection : on ne peut qu’attendre. 

En plein XVIIe siècle, époque célèbre pour ses grands hivers, sœur Angélique de Port Royal, confinée dans la fraîche vallée de Chevreuse, vomissait le « détestable mois d’août » et ses après-midi brûlants. Elle attendait désespérément de voir la pluie revenir. Qu’aurait-elle dit en 2022 ? Les canicules, les incendies, l’accablement qui nous a envahis semaine après semaine avec ces orages annoncés qui, à chaque fois, « passaient à côté » et laissaient les arbres à leur souffrance, et les éleveurs à leur tracassin, et les maïs à leur soif, et les potagers en capilotade, nous en avons été frappés plus que nous étions capables de l’imaginer quand les vacances ont commencé. 

Le goût des grandes vacances d’autrefois

Les premiers jours brûlants de juillet avaient été délicieux. Ils avaient le goût des grandes vacances d’autrefois. Les moissons rentrées tôt, un bonheur très lointain refaisait surface avec les premières grandes chaleurs, et je songeais à ma grand-mère qui affirmait, lorsque j’étais enfant : « Autrefois, les étés étaient beaucoup plus chauds qu’aujourd’hui » (on ne parlait pas alors de réchauffement climatique), et exigeait qu’on poussât les persiennes dès neuf heures du matin pour garder la fraîcheur de la maison. Plus il faisait chaud, plus nous voulions jouer dehors. Plus la canicule frappait, plus nous étions en grandes vacances. La canicule divisait les générations : les enfants voulaient sortir, les grandes personnes voulaient rentrer. 

Et puis au fil des jours, le bonheur a viré au cauchemar. La campagne s’est figée, sidérée par le feu.

Nous avons retrouvé un peu de cela, au début de l’été. La chaleur s’abattait sur une campagne qui venait de boire — 30 millimètres entre le 30 juin et le 2 juillet chez moi — et se laissait aller à une ivresse prolifique. Et puis au fil des jours, le bonheur a viré au cauchemar. La campagne s’est figée, sidérée par le feu. Nous avons compris ce que voulait dire Sœur Angélique avec son mois d’août détesté, mois le plus horrible de tous les mois, quand l’orage n’éclate pas. 

Il ne pleuvrait jamais plus

L’orage n’éclatait pas. Juillet, rien ; août, rien. Thérèse Desqueyroux, héroïne de Mauriac, voyait en un songe prémonitoire le grand incendie qui brûlerait un jour la forêt landaise et se persuadait qu’ « il ne pleuvrait jamais plus ». Cet été, nous sommes tous devenus Thérèse : nous avons vu les images de nos forêts en flammes et nous nous sommes persuadés qu’il ne pleuvrait jamais plus. Matin, midi et soir, la radio nous assénait que le réchauffement climatique était inéluctable, irréversible, et causé par nos péchés. Causé par nos péchés, surtout. Il fallait faire pénitence, comme prêchait Philippilus, le prophète de l’Étoile mystérieuse, mais il était déjà trop tard. Il ne pleuvrait jamais plus. Notre monde venait d’inventer la pénitence sans rédemption. Nul doute que le diable était parti de ce monde-là. Il s’en mêlait : l’Enfer n’a jamais été comparé à un congélateur ; il est un réchauffement climatique qui ne s’arrête jamais. Il n’y a pas si longtemps, Polnareff chantait qu’on ira tous au Paradis. La nouvelle musique médiatique nous enseignait que nous rôtirons tous en enfer. Certains écologistes ajoutaient que c’était bien fait pour nous.

C’est ainsi que la vieille peur gauloise du ciel qui nous tombe sur la tête occupa pendant quelques semaines le vide laissé par la foi chrétienne morte. La terreur païenne prospérait en terrain conquis. Il n’y a pas eu de procession cet été pour demander la pluie. Notre monde ne demandait plus rien. Il n’attendait plus la pluie. Il ne savait que punir. Punir tout le monde avant de griller tous ensemble. Mais le monde se trompe : il va bientôt pleuvoir. Et nous savons que, pluie ou beau temps, nous allons vers la Vie.

Tags:
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