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Le 1er avril 1922, l’impératrice Zita de Habsbourg reste au pied du lit où son époux, Charles d’Autriche vient de s’endormir à jamais. Déchirée, elle le regarde en pleurant. Il est revêtu de l’uniforme de feld-maréchal de la monarchie austro-hongroise, et tient dans ses mains jointes le chapelet et le crucifix. Il a juste 34 ans. Depuis novembre 1921, la famille vivait dépouillée de toute sa fortune, connaissant la faim et la pauvreté, en exil sur l’île de Madère, au Portugal. “Dans le danger et l’adversité, répétait souvent Zita, la place de la reine est auprès du roi.” Justement, ce dernier est tombé gravement malade. Et sur son lit de mort, il lui a encore dit sa devise : “Je m’engage toujours, en toutes choses, à connaître le plus clairement possible la volonté de Dieu et à la respecter, et cela de la manière la plus parfaite.” Enfin, il a adressé ces derniers mots : “Mon amour pour toi n’a pas de fin.”
Quelle beauté, quelle jeunesse ! Dire que je dois le rendre à son Créateur !
Enceinte de leur huitième enfant, Zita n’a que 29 ans quand elle devient veuve. Au moment de la mort de son époux, l’impératrice l’accepte douloureusement, parce qu’elle a cru à la guérison jusqu’au bout. En se recueillant une dernière fois auprès de son mari, elle ne peut s’empêcher de s’exclamer : “Quelle beauté, quelle jeunesse ! Dire que je dois le rendre à son Créateur !”
Pour Elizabeth Montfort, auteur de Charles et Zita de Habsbourg, itinéraire spirituel d’un couple, Zita“était absolument sûre que Charles avait accédé au trône par pure providence. Fiancée, le pape Pie X lui avait dit une phrase prophétique au moment où la jeune femme lui demandait sa bénédiction pour le futur foyer : Charles sera l’héritier du trône, c’est un cadeau pour l’Église parce qu’il est très catholique. Zita lui avait alors précisé que c’est François Ferdinand qui allait devenir empereur… Elle a toujours gardé cette phrase prophétique du Pape et pensait donc que son époux allait guérir. Si sa raison n’acceptait pas sa mort, sa foi le lui a permis douloureusement”, explique-t-elle à Aleteia.
Zita veut être pleinement fidèle à son mari pour tout le restant de sa vie. Elle portera le deuil de Charles jusqu’à sa propre mort.
Le 5 avril 1922, plus de 30.000 fidèles de l’île de Madère assistent à la messe des funérailles, célébrée par Mgr Pereira de Ribeira, l’évêque de l’île, en habits pontificaux. À la fin de la cérémonie, Zita s’effondre et prend dans ses bras Otto, son fils aîné de dix ans. Puis, elle se redresse aussitôt : pour Charles, pour les enfants, pour son honneur, elle doit être digne. Mais pas seulement. Zita veut aussi être pleinement fidèle à son mari pour tout le restant de sa vie. Elle portera le deuil de Charles jusqu’à sa propre mort.
La grâce du veuvage
“Comment dois-je maintenant, subitement, décider de tout toute seule ? Charles dirigeait et réglait tout”, se demande Zita, installée désormais avec ses huit enfants dans une maison mise à sa disposition par Alphonse XIII, le roi d’Espagne, à Lekeitio, un petit village des pêcheurs au Pays basque. Ces conditions de vie très éloignées du faste impérial lui conviennent, Zita qui ne veut pas être un poids pour ceux qui l’accueillent. Elle s’y occupera de l’éducation de ses huit enfants.
Pour l’éducation des enfants, je n’ai pas de choix à faire. Je dois les élever selon l’esprit de l’empereur, en faire des hommes qui craignent Dieu.
Pendant toute leur vie commune à Madère, Charles, pressentant sa fin prochaine, avait préparé son épouse à élever leurs enfants, dont Otto en particulier, fils aîné, appelé un jour à monter sur le trône. “Pour l’éducation des enfants, je n’ai pas de choix à faire. Je dois les élever selon l’esprit de l’empereur, en faire des hommes qui craignent Dieu, et avant tout préparer Otto à son avenir”, écrit-elle au baron de Werkmann, l’ancien secrétaire de Charles.
“Charles tenait pour ses enfants à une éducation dans la droiture et le service de la monarchie. L’empereur lui avait demandé d’en prendre soin selon ces conseils. Et elle les a appliqués. Il ne faut pas oublier que son époux n’a jamais abdiqué. Il n’a pas renoncé à sa responsabilité d’empereur et de roi. De la même manière Zita n’a abdiqué non plus : sa fidélité à la parole du mariage, aux paroles du couronnement et sa foi l’ont aidée à tenir sa promesse jusqu’à sa mort”, analyse Elizabeth Montfort.
Après tout, on est heureux, d’avoir eu beaucoup d’épreuves : d’abord, elles sont passées et, surtout, on est heureux d’avoir quelque chose à donner au Bon Dieu.
Rien d’étonnant donc à ce que toutes les traditions et les rituels soient maintenus par Zita comme du vivant de Charles. Chaque jour, elle se lève à 5h du matin pour assister à la messe des femmes des pêcheurs. De retour vers 7h, elle réveille les enfants et leur lit la vie du saint du jour. Ensuite, toute la famille se retrouve à 7h30 dans la chapelle pour la messe. Après le petit-déjeuner commence alors la journée d’études. Elle est particulièrement chargée pour Otto. Pourtant, avec le temps Zita apprend petit à petit à être plus sereine. “Le Bon Dieu ne permet jamais que je m’inquiète. Il m’envoie toujours à point l’indispensable”, confie-t-elle dans une lettre à des moniales de Sainte-Cécile de Solesmes, citée dans l’ouvrage d’Elizabeth Montfort. En 1925, elle ajoute dans sa correspondance : “Après tout, on est heureux, d’avoir eu beaucoup d’épreuves : d’abord, elles sont passées et, surtout, on est heureux d’avoir quelque chose à donner au Bon Dieu”. Ce n’est pas un hasard si le 24 mai 1926, l’impératrice devient oblate de l’abbaye Saint-Pierre de Solesmes.
Le sens et la plénitude
À partir de ce moment-là dans différents lieux de son exil, entre la Belgique, les États-Unis, le Québec et enfin la Suisse, Zita, toujours habillée en noir, garde comme trésor sa fidélité à Charles. Elle se laisse conduire par la providence, en retrouvant son mari chaque jour dans la prière. Ne lui-avait-t-il pas dit : “Je t’aime infiniment, dans le cœur de Jésus nous nous retrouverons ?” Zita sait, à chaque moment de prière ou d’adoration, qu’elle le retrouve. “C’est là qu’elle puise sa force pour tenir dans les épreuves”, poursuit l’auteur du livre sur le couple impérial.
En 1972, Zita confiera dans une interview accordée à la télévision autrichienne que “l’empereur a donné à sa vie son sens et sa plénitude.” Pour celle qui a su unifier intérieurement toutes ces dimensions, celle de femme, d’épouse, de mère, de reine et d’impératrice, la grâce du sacrement de son mariage avec Charles s’est transformée en grâce du veuvage.
Pour aller plus loin :
Association Les Amis de l’Impératrice Zitapour la béatification de l’impératrice Zita : fondée en concertation avec Dom Dupont, le Père Abbé de Solesmes et l’Archiduc Rudolf d’Autriche, elleest animée notamment par Elizabeth Montfort, ancien député européen et Jean Sévillia, journaliste et historien.