Qu’est-ce qu’un bon dévot ? Un catholique qui se rend à la messe tous les jours ? Un catholique qui se confesse toutes les semaines ? Ou encore un catholique particulièrement généreux avec plus pauvre que lui ? Rien de tout cela, en réalité, à en croire ce que le pape François rappelle dans sa dernière lettre apostolique Totum amoris est, publiée à l’occasion des 400 ans de la mort de saint François de Sales.
Passée sous silence en raison du décès et des funérailles de Benoît XVI, elle comprend pourtant quelques perles de sagesse et n’est pas dénuée d’humour. Elle revient ainsi sur ce qu’est la “vraie dévotion”, en s’inspirant des enseignements de ce grand docteur de l’Église à la délicieuse finesse d’esprit.
Ainsi, si l’on est adepte du jeûne, et capable de rester 24 heures sans manger au cours de notre Carême, saint François de Sales nous enseigne que point n’est besoin de sacrifier notre repas, ou même un simple carré de chocolat, si l’on se repaît quotidiennement de calomnies ou de médisances vis-à-vis de notre prochain !
“Celui qui est adonné au jeûne se tiendra pour bien dévot pourvu qu’il jeûne, quoi que son cœur soit plein de rancune ; et n’osant point tremper sa langue dans le vin ni même dans l’eau, par sobriété, ne se feindra point de la plonger dedans le sang du prochain par la médisance et calomnie.”
Si l’on bat des records d’oraison, et que l’on est capable de rester à genoux devant le Saint Sacrement deux heures durant sans s’endormir ni se relever, grand bien nous fasse ! Mais cela nous sera totalement inutile, et à Dieu aussi par la même occasion, si, une heure après nos saintes prières, nous répandons notre fiel sur un collègue de travail :
“Un autre s’estimera dévot parce qu’il dit une grande multitude d’oraisons tous les jours, quoi qu’après cela sa langue se fonde toute en paroles fâcheuses, arrogantes et injurieuses parmi ses domestiques et voisins”
Une description incisive et actuelle
Nous ressentons de la fierté d’avoir donné au pauvre notre fond de portefeuille, ou un chèque mensuel à une association ? La belle affaire, si nous ne parvenons toujours pas à pardonner à nos ennemis, de notre “odieuse” belle-mère à ceux qui nous ont délibérément blessés au cours de notre vie :
“L’autre tire fort volontiers l’aumône de sa bourse pour la donner aux pauvres, mais il ne peut tirer la douceur de son cœur pour pardonner à ses ennemis ; l’autre pardonnera à ses ennemis, mais de tenir raison à ses créanciers, jamais qu’à vive force de justice”.
Une description de la fausse dévotion particulièrement incisive et très actuelle. François souligne qu’il s’agit de vices de tous temps, qui se constatent encore aujourd’hui. Cet enseignement rappelle que, sans amour véritable et sans charité, les efforts fournis pour s’attirer les bonnes grâces de Dieu n’y feront rien et seront même totalement vains. Une leçon qui avait déjà été donnée par saint Paul dans sa première lettre aux Corinthiens :
J’aurais beau être prophète, avoir toute la science des mystères et toute la connaissance de Dieu, j’aurais beau avoir toute la foi jusqu’à transporter les montagnes, s’il me manque l’amour, je ne suis rien.
J’aurais beau distribuer toute ma fortune aux affamés, j’aurais beau me faire brûler vif, s’il me manque l’amour, cela ne me sert à rien.