Revoilà le Pape aux Émirats arabes unis. Après Abou Dhabi en février 2019, la rumeur a été confirmée : François devrait bien se rendre à Dubaï fin novembre pour assister à la COP28. Un voyage express sur un thème qui lui est cher, l’écologie, et une région qu’il a visitée plus qu’aucun autre pape. Ce voyage est en cohérence profonde avec la diplomatie qu’il mène depuis 2013.
Si François s’est beaucoup rendu en Amérique latine, par la logique des choses compte-tenu de ses origines et par l’importance de ce continent, il ne s’y est plus rendu depuis 2019 et les Journées mondiales de la jeunesse (JMJ) de Panama. Mais de fil en aiguille, de voyages en rencontres, c’est une autre figure qui est en train d’apparaître, celle d’un pape qui sillonne la péninsule arabique comme aucun pape avant lui : Abu Dhabi, Jordanie, Irak, Terre sainte, Bahreïn et Dubaï. S’il ne peut pas se rendre en Arabie saoudite, le cardinal Tauran y était allé en avril 2018, déjà très affaibli par la maladie. C’était la première fois qu’un dignitaire aussi important du Saint-Siège se rendait dans ce pays considéré comme terre sacrée par les musulmans les plus rigoristes.
Cohérence intellectuelle
Ce voyage à Dubaï s’inscrit dans l’esprit du Document sur la fraternité humaine pour la paix mondiale et la coexistence commune signé en 2019 lors du voyage aux Émirats. Le positionnement de la diplomatie vaticane consiste à parler de sujets communs, où il peut y avoir entente, pour faire avancer la paix et la coexistence. L’écologie fait partie de ce thème, d’autant que la prochaine COP se tiendra à Dubaï. Un voyage qui s’inscrit aussi dans l’esprit de celui du Kazakhstan (septembre 2022) où le pape avait assisté au VIIe Forum des chefs religieux du monde. Un Forum que la diplomatie vaticane avait déjà fréquenté, mais, là aussi, la visite du Pape était une première.
Cohérence diplomatique
Si ses prédécesseurs ont effectué des voyages de type pèlerinage (Terre sainte, Lourdes) ou apostolique (dans les grands pays chrétiens), François a initié un nouveau type de voyage : celui des conférences internationales. Bien sûr, l’ONU reste l’un des passages obligés et l’on se souvient encore des discours de Paul VI, de Jean Paul II et de Benoît XVI et François est lui-même passé par cette figure imposée. Mais chacun se rend bien compte, et dans les chancelleries notamment, que l’ONU ne sert plus à grand-chose. Elle est d’ailleurs inaudible sur l’Ukraine, le Yémen, le Soudan et Israël. Depuis une quinzaine d’années, c’est un nouveau type de diplomatie internationale qui se met en place, celle des conférences et des forums, mondiaux, régionaux ou thématiques. C’est là que les dirigeants se rencontrent, échangent, prennent des décisions. C’est là que les pays doivent être présents, pour se montrer et tenir le terrain.
Ces voyages du Pape pourront surprendre tant ils sont nouveaux par rapport aux types de voyages effectués par Jean Paul II et Benoît XVI. Mais ils correspondent aux évolutions de la diplomatie mondiale, qui est beaucoup plus celle des villes et des ensembles régionaux que des grandes réunions à New York. Le Saint-Siège, comme État et acteur des relations internationales, s’adapte à cette réalité nouvelle.
Cohérence thématique
Enfin, ce voyage est en cohérence avec les thèmes portés par François, de Laudato si’ à Laudate Deum. Importance de l’écologie, de la maison commune, de la coopération internationale. C’est l’occasion pour lui de porter lui-même son discours, et non pas uniquement par la voie de ses diplomates, et de rencontrer des dirigeants et des ministres. Une “culture de la rencontre” sur laquelle il insiste beaucoup et qu’il porte, comme une autre cohérence thématique de son action diplomatique.