L’événement est relaté par l’évangile de Mathieu (Mt 2,13) : “Voici que l’ange du Seigneur apparaît en songe à Joseph et lui dit : ‘Lève-toi ; prends l’enfant et sa mère, et fuis en Égypte. Reste là-bas jusqu’à ce que je t’avertisse, car Hérode va rechercher l’enfant pour le faire périr’.” L’Évangéliste poursuit que c’est cette même nuit suivant l’avis de l’ange que Joseph et Marie emportant le nouveau-né prirent la route en direction de l’Égypte.
Et effectivement, Hérode lorsqu’il réalisa que les Mages l’avaient trompé en ne lui révélant pas le lieu de la divine naissance, entra dans une grande fureur et ordonna alors de tuer tous les enfants jusqu’à l’âge de deux ans non seulement à Bethléem, mais également dans toute la région… C’est ainsi au Massacre des Innocents auquel allait échapper Jésus par cette fuite effrénée de Marie. Nous n’en savons pas plus sur cette fuite et ce séjour en Égypte si ce n’est ce qu’en livreront, par ailleurs, des apocryphes chrétiens dont la Vie de Jésus en arabe, non reconnu par l’Église, et qui relate dans le détail les premiers miracles de Jésus initié en terres égyptiennes à la magie…
Mais, à la mort d’Hérode, ainsi que l’Ange l’avait annoncé, celui-ci vint avertir la Sainte Famille qu’elle pouvait rentrer tout en évitant la Judée où Arkélaüs, fils d’Hérode, venait de succéder à son père. C’est en région de Galilée que Marie, Joseph et Jésus devaient alors s’établir.
Une fuite symbolique
À la lecture de ces tragiques événements, le lecteur de la Bible ne pourra qu’être surpris, le Messie né dans une mangeoire se doit afin d’échapper à une mort certaine fuir dans le pays qui traditionnellement sous l’Ancien Testament a représenté l’ennemi même d’Israël… Cette ambiguïté de la terre d’exil n’est relatée que par Mathieu qui souligne dans son évangile que “nul n’est prophète en son pays”…
C’est de nouveau d’Égypte que la Sainte Famille sera de nouveau conduite vers la Terre promise, un appel rappelant l’Exode des Hébreux sous la conduite de Moïse fuyant Pharaon. Jésus dès sa naissance est ainsi investi d’une mission universelle qui lui fait dépasser le cadre géographique de sa naissance.
La Fuite en Égypte représentée par les artistes
Marie accompagnée de son fils et de son époux fuyant en Égypte a fait l’objet de très nombreuses représentations tranchant avec le caractère dramatique de l’épisode. Les artistes ont, en effet, préféré livrer la plupart du temps une autre vision, celle de la confiance de Marie en la Divine providence.
Seul Giotto, au tournant du XIVe siècle, dans une fresque de la Chapelle des Scrovegni à Padoue proposera une scène plus inquiétante : les montagnes escarpées et les ravins suggérés, en plus des couleurs sombres, dressant une atmosphère oppressante d’où seule ressort radieuse et stoïque Marie tenant son enfant.
Par opposition, le grand maître de la peinture française classique du XVIIe siècle, Nicolas Poussin, a livré, pour sa part, dans un tableau conservé au musée des Beaux-arts de Lyon une version beaucoup plus radieuse de ce qui apparaît plus comme une promenade bucolique qu’une fuite désespérée. Guidés par l’ange leur intimant la direction à suivre, Marie portant son enfant et Joseph jettent un dernier regard en arrière, seul signe du danger auquel ils viennent d’échapper.