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Le drame de l’infertilité

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Benoist de Sinety - publié le 21/01/24

La douleur de l’infertilité a des causes multiples, auxquelles il faut ajouter la dramatique baisse du désir d’enfant. La natalité d’une nation dit beaucoup de sa capacité à croire en elle-même, affirme le père Benoist de Sinety, curé-doyen de Lille, qui se demande : « Sommes-nous encore désireux de porter du fruit ? »

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Il y a des douleurs qui se traduisent en fureurs, en colères : manifestations, procès, insultes, les batailles sont suffisamment et malheureusement nombreuses et épuisent notre société. Il y a des douleurs silencieuses, souvent parce qu’intimes. Elles se consolent dans les bras d’un proche ou la tendresse familiale. Elles peuvent aussi provoquer des souffrances si profondes qu’on ne s’en relève que mal. En 2022, un rapport remis au gouvernement mettait en lumière que parmi les 15 millions d’adultes âgés de 20 à 49 ans qui ont déjà essayé d’avoir un enfant, 3,3 millions de femmes et d’hommes ont rencontré des problèmes d’infertilité. « Pour ces hommes et ces femmes, le risque d’avoir une difficulté à concevoir qui conduise à consulter un médecin est estimé à 24%, soit un couple sur quatre », est-il écrit dans ce rapport. Selon ces sources, il est plus que probable qu’en moyenne, chaque classe de maternelle compte un enfant né par PMA.

Les causes de l’infertilité

Chacun, nous connaissons autour de nous un ou plusieurs couples qui portent cette angoisse de « ne pas y arriver », qui mois après mois se transforme en peur. L’équilibre conjugal, le regard social et l’incompréhension devant cet échec que rien n’annonçait, un entourage désarmé et des propositions thérapeutiques vertigineuses en terme éthique et assez peu efficientes, prenant même parfois l’aspect de parcours du combattant où la santé psychique et parfois biologique de la femme sont soumises à rude épreuve : à cela s’ajoute le tabou de l’échec renforcé par un imaginaire sexuel débridé et forcément hyper performant.

Quelles sont les causes de cette infertilité, qui préoccupe jusqu’aux plus hautes sphères, puisque l’État en fait désormais une cause nationale ? La généralisation du travail et la recherche d’une stabilité professionnelle comme condition pour mettre en place une relation affective pérenne. Les modes de vie, urbains et « festifs » où le tabac, l’alcool et le cannabis, les déséquilibres alimentaires qui agissent sur les adultes mais aussi qui provoquent chez leurs enfants un certain nombre de facteurs qui affectent la fertilité d’une génération sur l’autre. Les facteurs environnementaux comme les perturbateurs endocriniens, les métaux lourds, les solvants, les pesticides. Et puis il y a le grand tabou autour de la pilule contraceptive : une recherche sur Internet laisse entrevoir des rapports et des contre-rapports nombreux. Les uns s’alarment sur une corrélation entre prise de pilule dans le long terme et infertilité. Les autres affirment aussitôt le contraire, allant même, pour certains, certifier sans craindre le ridicule, l’effet inverse ! 

La natalité d’une nation dit beaucoup de sa capacité à croire en elle-même

À quoi bon mettre un enfant au monde ?

Il y a plus de vingt ans, alors que je rencontrais nombre de couples souffrant d’une attente dont ils n’expliquaient pas la durée, une amie médecin me disait que des rapports de la Sécurité sociale corrélaient la difficulté à « mettre en route » un premier bébé avec le niveau socioprofessionnel des futurs parents. En bref, plus le niveau d’étude est élevé, plus tardivement naît le premier enfant. Le médical ne fait pas tout : notre cerveau contrôle parfois bien plus que nous ne le pensons des capacités qu’il est trop facile de réduire à un aspect purement mécanique. Les causes sont donc multiples, auxquelles il faut ajouter cette tendance, volontaire et non pas accidentelle pour le coup, qui, encore très minoritaire, gagne du terrain dans l’inconscient collectif des jeunes générations : à quoi bon ? À quoi bon mettre au monde des enfants qui viendraient participer comme chaque humain à la destruction d’une planète qui se dégrade sous nos yeux ?

La natalité d’une nation dit beaucoup de sa capacité à croire en elle-même, et l’inverse est vrai tout autant. En utilisant le mot même de « fertilité », le président de la République dit tout de l’enjeu : sommes-nous encore désireux de porter du fruit ? Avec 678.000 naissances en 2023, soit une chute de 7% par rapport à 2022, le taux de fécondité tombe de 1,68 enfant par femme en âge de porter la vie. Il n’y a pas de nouvelle plus irradiante de joie que l’annonce d’une naissance. Cette joie se fait de plus en plus rare. 

Politique familiale

Sans doute, une partie de la réponse demeure politique. Mais une rapide consultation des législations en matière de politique familiale laisse pantois. Depuis 1932 et la loi Landry qui pose les bases des allocations familiales, l’inflation des lois donne le vertige. Singulièrement depuis les années 1990. Depuis ces trente dernières années, on se préoccupe beaucoup plus de la composition du couple que de la manière dont il faut l’aider à accueillir et élever des enfants. 

Outre les aspects matériels sur lesquels la loi doit se pencher avec la science afin d’aider à résoudre les causes recensées qui mettent à mal la fécondité, n’y en a-t-il pas d’autres, plus profondes, immatérielles, qu’il nous appartient de réfléchir ensemble ? Dans notre manière de parler de l’avenir, dans notre désir de construire ensemble, dans l’Espérance qui anime les croyants ? Et nous souvenir, nous, chrétiens, que chaque nouvelle vie est la possibilité d’un amour plus grand.

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