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“Jeanne, sans sépulcre et sans portrait… » : comme Malraux fut inspiré dans son discours à Rouen en 1964 ! Personnellement, Jeanne me parle depuis des dizaines d’années. Peut-être parce que j’ai aussi entendu la voix de Dieu qui parlait à mon âme quand j’étais enfant : il préparait mon esprit à répondre oui librement pour devenir prêtre. J’étais à Rouen. L’église dont je suis le curé aujourd’hui n’existait pas encore. Jeanne, sans sépulcre, sans portrait et sans église ! Depuis 600 ans, Rouen tournait autour du bûcher, complexée, ennuyée, pas vraiment responsable de la mort de Jeanne. Mais à côté d’Orléans qui célébrait sa libération grâce à la Pucelle, qu’est-ce que Rouen pouvait célébrer ? Rien probablement : sans sépulcre, sans portrait…
“Un repère ancré en moi”
Pourtant dans mon cœur, tout en elle me parlait. Tout me parle. Comme dans tant de cœurs de Rouennais, de visiteurs, de touristes, de tout âge, toute langue, toute culture et toute foi même. Jeanne me bouleverse. Je découvre qu’elle est un repère ancré en moi. Je la prie pour les missions confiées. Par elle, les projets missionnaires sont actés ! Loin de la cour des gentils du gentil Dauphin à Chinon, flagorneurs passifs d’une situation qui ne doit pas changer, elle m’entraîne dans les plaines des batailles âpres et complexes ! Ai-je une épée ou un étendard ? Qui gagne ? L’homme ou Dieu ? Est-ce mon carnet d’adresses ou la foi qui sauve ? Dans le donjon de mon cœur, elle me dit de me mettre à l’écart, pour prier. Là où l’activisme pourrait faire croire que je suis important, Jeanne me dit : J’avais 16 ans quand je suis devenue général des Armées de France. Et toi, arrives-tu déjà à être général de ta propre vie ?
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Sans jugement mais sans complexe non plus, Jeanne est fin stratège ! Son humour est intense. Le mien est parfois cassant. Elle est fine. Elle me rappelle qu’avec amour, on gagne toujours. Alors, quand des collaborateurs me poussent à prendre des décisions un peu sèches ou pas très justes, je ne dis pas que malheureusement je parviens à ne blesser personne, mais Jeanne m’accompagne sur le champ de bataille pour demander pardon, supplier l’absolution, invoquer la miséricorde et œuvrer en faveur de la fraternité.
Contemporaine du Christ et de nos vies
Quand le mensonge ronge et aveugle, la cavalière de France me rappelle les chevaux de l’Apocalypse. Je me confesse avec plus d’allant, plus d’élan, moins de fioritures, plus de précision. Quand, prêtre à l’autel, je divague dans mes pensées — plutôt que de prendre un chat comme saint Philippe Néri, et parce que mes divagations sont loin d’être mystiques ! — l’image de l’anneau de la communion de Jeanne me rappelle quelle alliance Dieu a voulu faire avec moi depuis l’âge de 8 ans : je rends alors grâce de n’avoir raté aucune messe du dimanche depuis cet âge, alors que bien des raisons auraient pu l’emporter. Avec joie, je remercie Dieu que mes parents m’aient appris le Pater, l’Ave et le Credo, comme ceux de Jeanne. Aujourd’hui, à ces trois prières quotidiennes, je rajoute le Veni Creator. C’est l’Église.
Le portrait s’esquisse, comme une toile impressionniste. L’étendard de Rouen présente l’Agneau pascal, Jésus Bon Pasteur qui donne sa vie pour ses brebis : l’arc du Gros-Horloge, entre la cathédrale et le sanctuaire Jeanne-d’Arc, le décrit avec force : passe par la porte qui est le Christ ! Il est lui le victorieux, humble donateur de vie. Jeanne en est le témoin d’hier. Elle est tellement contemporaine du Christ et de nos vies, et de ma vie. Venez à Rouen en faire l’expérience !
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