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Le pressoir mystique, cette allégorie oubliée du sacrifice du Christ

Pressoir mystique

© Wolfgang Sauber, CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons

Sophie Roubertie - publié le 14/04/22

Peu connue, la représentation de Jésus crucifié sous la forme du "pressoir mystique" peut dérouter. Pourtant, celle-ci est une invitation à méditer avec force sur le mystère de la Passion du Christ.

Peut-être n’en avez-vous jamais entendu parler. Il est vrai que la représentation du corps de Jésus dans un pressoir a de quoi surprendre nos esprits contemporains, peu habitués à ces représentations symboliques — et particulièrement crues — des Écritures. Et pourtant, cette iconographie nous invite à méditer davantage sur la puissance de l’Eucharistie, car elle y exprime toute l’horreur de la Passion afin de bien faire comprendre au fidèle que le Christ a versé son sang jusqu’à la dernière goutte pour racheter l’humanité.

Les premières représentations du « pressoir mystique » apparaissent vers le XVe siècle, plus particulièrement en Europe du Nord, pour perdurer jusqu’au XVIIe siècle. Si la vigne et le vin faisaient depuis longtemps partie des images peuplant les Écritures et l’imaginaire chrétien, jamais ils n’avaient été utilisés avec autant de force que dans la symbolique du « pressoir mystique ».

PRESSOIR MYSTIQUE
Dans ce tableau, peint par Durer, le Christ écrase lui-même le vin avec ses pieds. Il en ressort, non pas du vin, mais des hosties.

Véritable allégorie de la Passion et du Salut, le pressoir mystique pouvait être traité différemment selon les artistes. Dans certaines iconographies, Jésus est placé dans un pressoir et écrase le raisin lui-même avec ses pieds. Une image qui n’est pas sans rappeler cette phrase d’Isaïe : « À la cuve, j’étais seul à fouler : personne de mon peuple avec moi ! » (Is 63, 3) ; préfiguration de la passion et du sacrifice rédempteur du Christ. Dans une toile impressionnante réalisée par Durer, ce n’est pas du vin qui en ressort mais bien des hosties recueillies par saint Pierre habillé de ses vêtements pontificaux. Une manière de rappeler que dans chaque hostie consacrée s’incarne le vrai corps du Christ.

Dans d’autres œuvres, plus crues, le corps de Jésus supplicié est placé dans le pressoir, laissant couler son sang, comme le fruit de la vigne qu’il faut écraser pour obtenir du vin. Il est parfois même couché directement sous la vis du pressoir, la traverse formant une croix l’écrasant sous son poids. Il n’est d’ailleurs pas rare de voir Dieu le Père tourner lui-même le pressoir, rappelant que c’est lui qui a offert son Fils en sacrifice.

Pressoir Mystique
À Saint-Étienne-du-Mont, le Christ, placé dans la cuve du pressoir, est écrasé sous le poids de sa croix.

Un exemple saisissant de pressoir mystique est visible dans un grand vitrail à l’église Saint-Étienne-du-Mont à Paris. On y voit le Christ allongé dans la cuve, son bras gauche enlaçant la croix qui sert de traverse. Écrasé sous son poids, le corps du Christ laisse échapper du sang qui est recueilli dans des fûts.

« Moi, je suis la vraie vigne »

Pour le comprendre, il suffit de relire les Écritures. Jésus est constamment rapproché de la vigne comme l’évoque saint Jean : « Moi, je suis la vraie vigne, et mon Père est le vigneron » (Jn 15, 1). L’Église est en effet une vigne féconde, le Christ en est le cep et les disciples, les sarments. Au soir du Jeudi saint, Jésus invite même ses disciples à boire son sang en leur tendant un calice rempli de vin : « Buvez-en tous, car ceci est mon sang » (Mt 26, 37). L’analogie entre le fruit de la vigne et le sang du Christ a ainsi naturellement inspiré les artistes. En s’écoulant dans un calice, le sang du Christ est ainsi montré comme la source de tous les sacrements, en particulier l’Eucharistie. 

Si la vigne est souvent évoquée dans la Bible, le terme de « pressoir » est davantage utilisé par les grands saints. Saint Augustin déclarait ainsi : « La première grappe de raisin écrasée dans le pressoir est le Christ. Quand cette grappe fut pressée dans la Passion, il en a jailli ce vin dont le calice est autant enivrant qu’excellent ! ». Au XIIIe siècle, l’image qu’utilise saint Boniface pour parler du sacrifice du Christ est suffisamment forte pour nourrir l’inspiration des artistes : « Le Christ crucifié, comme une grappe écrasée dans le pressoir, a extrait par les blessures de son corps fleuri ce suc parfumé qui peut guérir toute maladie ».

Si le pressoir mystique a peu à peu disparu de l’iconographie chrétienne, sans doute en raison de sa vision trop crue du sacrifice du Christ, elle rappelle cependant de manière très explicite que le Salut ne peut s’obtenir qu’en allant directement à la « source », c’est à dire vers le Christ rédempteur.

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CroixeucharistieJésusVendredi saint
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