Mgr Isodoro Mora, évêque du diocèse de Siuna au Nicaragua (nord-est du pays, ndlr) a été arrêté par la police sandiniste mercredi 20 décembre. Plusieurs personnalités, à l’image de l’avocate pénaliste en exil Martha Patricia Molina, ainsi que des ONG comme Libertad Religiosa Nicaragua, ont dénoncé son arrestation et sa détention arbitraires alors qu’il se préparait à donner le sacrement de confirmation dans une paroisse de Rio Grande. Cette information a été confirmée par des sources ecclésiastiques au journal nicaraguayen 100% Noticias : “L’évêque était dans le fourgon de police, on ne sait pas s’ils l’ont emmené à Matagalpa ou directement à El Chipote [ prison tristement célèbre pour ses conditions de détentions désastreuses] à Managua.” Deux séminaristes, Alester Saenz et Tony Palacio, ont également été arrêtés.
Selon l’ancien ambassadeur du Nicaragua auprès de l’Organisation des États américains, Arturo McFields Yescas, l’arrestation de Mgr Mora est due à son sermon délivré lors du 99e anniversaire de la création canonique du diocèse de Matagalpa, dans la cathédrale Saint-Pierre Apôtre, mardi 19 décembre. Le prélat a notamment évoqué Mgr Rolando Alvarez, évêque de Matagalpa incarcéré depuis le 10 février 2023 pour “traîtrise à la patrie” dans la prison de Modelo située au nord de la capitale. “Nous sommes toujours unis en priant pour ce bien-aimé diocèse de Matagalpa, en priant pour Monseigneur Rolando, en priant pour le chemin [spirituel] de chacun de vous. Nous sommes unis dans la prière, dans la communion, dans la foi, dans l’amour, dans la tendresse”, a ainsi déclaré Mgr Mora au début de son homélie. En mars 2023, peu après l’incarcération de Mgr Alvarez, trois prêtres avaient été arrêtés pour avoir évoqué le prélat au cours de leurs homélies.
Un régime en guerre ouverte contre l’Église
Âgé de 63 ans, Mgr Isodoro Mora est donc le deuxième évêque à être arrêté par le régime de Daniel Ortega, en guerre ouverte contre l’Église catholique dans le pays. Cette arrestation s’inscrit dans un contexte d’intensification des représailles contre les catholiques du Nicaragua, avec une hausse significative des persécutions en 2023. Outre Mgr Alvarez et Mgr Mora, au moins 151 religieux ont été contraints à l’exil et expulsés entre 2018 et 2023, parmi eux 83 religieuses, 58 prêtres, un évêque, un nonce, cinq séminaristes et trois diacres, selon le dernier rapport la quatrième mise à jour de l’étude : Nicaragua : une Église persécutée ? par la chercheuse Martha Molina. Ces arrestations et expulsions arbitraires s’ajoutent à de multiples interdictions qui entravent la liberté de culte de la communauté catholique. Ainsi, dernièrement, ce sont les crèches vivantes ou encore les processions en honneur à l’Immaculée Conception qui ont été annulées dans les rues du Nicaragua, alors qu’elles s’y tenaient chaque année traditionnellement.
Le gouvernement de Daniel Ortega (au pouvoir depuis 2007, ndlr) voit l’Église comme un soutien majeur à ses opposants politiques. La hausse exponentielle des actes anticatholiques a fait entrer pour la première fois le Nicaragua dans l’Index mondial de persécution 2023 de l’ONG protestante “Portes Ouvertes”. L’Amérique Latine est ainsi devenue la région du monde où la persécution des chrétiens a augmenté le plus en 2023.
